Black Man

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C’est un thriller futuriste, c’est-à-dire que l’accent est fortement mis sur le côté suspense, l’intrigue à rebondissements et à actions violentes, et que le cadre est plus ou moins (plutôt moins) développé, avec parfois des problèmes de cohérence sur les points historiques, sociologiques, politiques ou scientifiques évoqués.

La date et le décor : début du 22e siècle, les années passées ont vu les États-Unis éclater en plusieurs confédérations dont l’une, sous le nom de Jesusland, revendique un retour au passéisme, au racisme et à l’obscurantisme, une autre, la Bordure, se veut le monde du futur, etc. Les Nations-Unies essayent de coordonner un peu cela. Différentes colonies ont été installées sur Mars, les voyages vers Mars (et les rares retours autorisés, car les colons sont généralement des déportés) sont gérés par l’Initiative Coloniale, ou LINCOLN, entreprise privée considérée comme un gouvernement indépendant. Si la guerre semble avoir été supprimée par une propagande qui fait croire que les seuls humains capables de se battre sont des variantes génétiques plus ou moins condamnées à l’extinction, en particulier les « Variante 13 » qui, par traitement génétique et, surtout, par un conditionnement complet de la naissance à l’enrôlement, ont été formées à tuer. Ces surhommes ne doivent leur puissance qu’au conditionnement anti-violence du reste de la population et à l’usage d’armes surpuissantes (la maille qui fournit sa lucidité et sa résistance au héros, un fusil Haag à balles virales dont on se demande pourquoi les victimes, se sachant condamnées à court terme, se laissent tuer vite plutôt que de devenir des tueurs enragés et sans limites). Un débat au cours du livre - pour savoir si les Variantes sont réellement des êtres différents, si leur variance est génétique et non seulement due à leur conditionnement - tourne court et l’affirmation selon laquelle les Variantes seraient les derniers humains non trafiqués est, par contre, répétée lourdement à plusieurs reprises par les personnages. Personnellement je reste convaincu d’une escroquerie politique de grande envergure derrière cette substitution de critères génétiques aux critères psychologiques, éducatifs, aux problèmes de conditionnement.

L’histoire : Le héros, un de ces "Variante 13" qui a réussi à revenir de Mars où il avait été déporté pour s’engager comme chasseur de primes, va être embauché pour une telle chasse dans des conditions bizarres. Comme il dispose d’un esprit analytique qui dépasse, de loin, ceux de ses employeurs et ceux des I.A.s, il flaire le coup monté et va effectivement découvrir tout autre chose que la version officielle. Bref, un thriller bien monté dans ce cadre plus ou moins cohérent ci-avant rappelé.

Jean-Claude Dunyach n’a pas voulu publier dans sa collection un autre thriller moins « daté », alors même que l’étude sociologique et psychologique d’un cadre malgré tout distinct d’une simple caricature du présent, y était plus fouillée (il s’agit de Market Forces, du même auteur). Dans celui-ci, l’aspect SF est plus affiché du fait de l’indication de dates et de faits historiques sous-jacents, mais peut-on vraiment dire que l’aspect science-fiction est plus net ? je n’en suis pas convaincu.

À mon avis, ce livre doit être lu en tant que thriller assez bien monté, mais pas comme une anticipation cohérente.

Richard Morgan, Black Man, traduction Cédric Perdereau, couverture Jean-Sébastien Rossbach, 572 p., Bragelonne

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