Manitou

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« Manitou » n’est autre que le premier roman rédigé par celui qui deviendra progressivement l’un des auteurs incontournables de la littérature de terreur de ces trente dernières années : Graham Masterton. Publié pour la première fois en 1975, ce récit a non seulement bénéficié d’une adaptation cinématographique, mais également de deux suites littéraires (« La Vengeance du Manitou » et « L’Ombre du Manitou »). Il s’agit d’un roman efficace, qui intègre habilement deux niveaux de fantastique, l’un surgi des peuples amérindiens ayant habité l’Amérique avant l’arrivée de l’homme blanc, l’autre découlant directement de la maîtrise technique de ce dernier sur son environnement.

Tout commence lorsqu’une certaine Karen vient trouver son médecin pour l’interroger au sujet d’une mystérieuse tumeur qui grossit à vue d’œil dans son cou. Après quelques examens, le doute n’est plus possible : la tumeur renferme un fœtus humain en formation ! La science traditionnelle se révélant incapable d’expliquer ce phénomène étrange, Karen se tourne alors vers un médium, un certain Harry Erskine, qui entreprend de découvrir les tenants et les aboutissants de cette histoire rocambolesque.

A la suite de recherches visant à décrypter le symbolisme des cauchemars frappant la jeune femme depuis l’apparition de la grosseur, il va s’avérer que la tumeur contient en vérité la réincarnation d’un puissant sorcier indien nommé Misquamacus qui, effrayé par l’arrivé des premiers colons européens sur sa terre natale, préfère effectuer de la sorte un bond de plusieurs siècles dans le futur de manière à leur échapper, du XVIème au XXème siècle !

Harry va dès lors déployer d’immenses efforts afin de sauver la vie Karen, dont la substance vitale est peu à peu absorbée par l’être en gestation dans la tumeur. Il va aussi devoir lutter contre ce sorcier revenu à la vie, dont le peuple a peu ou prou été complètement exterminé par les semblables d’Harry, dont la terre a été confisquée, mutilée. Il va de soi que dans ces conditions, la colère de Misquamacus s’avèrera difficile à étancher…

Si le récit ne manque pas de rebondissements et d’apparitions horrifiques, Masterton parvient également, au fil des pages, à glisser de-ci de-là une réflexion sous-jacente concernant la responsabilité des colons dans le génocide des Amérindiens. Du coup, la personnalité du sorcier qu’il dépeint n’est jamais totalement antipathique, car sa réaction peut en grande partie être comprise (sinon justifiée) au vu de ce que l’homme blanc a fait subir à son peuple.

L’édition ici proposée par Bragelonne permet de découvrir deux fins assez dissemblables, rédigées par Masterton à la demande de son éditeur, désireux de conférer davantage de « punch » au récit en rendant le personnage de Harry plus actif dans la résolution de l’histoire. L’analyse de cet exercice de style n’est pas sans intérêt pour quiconque s’intéresse aux techniques littéraires.

Pour résumer : « Manitou » constitue une bonne initiation à l’univers de Graham Masterton, qui sera utilement complétée par la lecture du reste de sa riche production.

Graham Masterton, Manitou, traduit de l’anglais par François Truchaud, 381 p., Bragelonne

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