On a marché sur...
Anthologie établie par l'association de jeux de rôles ForgeSonges, qui, s'intéressant à l'écriture, lança un concours « Plumes en Herbe » en 2008. En voici la deuxième édition, sur le thème « On a marché sur... ».
Sur les 71 textes reçus, 10 ont été retenus, ici publiés. Que voilà une excellente initiative de promouvoir des jeunes auteurs de SF francophones, à laquelle on ne peut qu'applaudir ! Seul bémol : aucune bio des dix auteurs, tous évidemment inconnus. C'est idiot : le but n'est pas du tout atteint, d'autant plus que certains textes sont vraiment excellents. Certes, ils traitent d’un thème bateau, l'écriture est classique, la trame linéaire et la chute est souvent prévisible. Et alors ? Tous ont un formidable appétit d'écrire, de raconter surtout. L'art de narrer une histoire est essentiel en littérature de l'Imaginaire, le lecteur ne demande pas plus. Il est réjouissant de voir cette qualité prépondérante dans la majorité des textes de ce recueil, tous agréables à lire.
Le premier, par exemple, Près des rivières de Mars de Hans Delrue, raconte la proclamation de l'indépendance d'une Mars terraformée, vue du côté des immigrés africains. Original, et drôle, au début du moins. La deuxième nouvelle est humoristique, déjà par son titre : Cours de diplomatie à l'usage du débutant (Loïc Weissbart). Ou le rapport d'une mission sur une planète habitée par des tas d'extraterrestres aussi divers que rigolos. Jusqu'au moment où l'on amène les humains à l'Ancêtre... Sheckley aurait été ravi. Tout à fait autre chose, La révolution sensible, de Cécile Luherne. Dans un monde connecté à tout crin (on pense au Successeur de pierre de Truong), le héros doit se risquer à l'extérieur, dans le monde réel, et découvre la nature, en vrai. Ivre de joie, il voudra partager son aventure, en vain : quand on vit dans un monde virtuel, on y reste. Un texte fort. Quatrième nouvelle impressionnante, Scorpio III, de Cédric Burgaud, qui m'a évoqué Le chemin du retour de Robert Silverberg, par la création d'un monde dominé par des animaux. Ici, point de homards, mais des scorpions, aux noms improbables (Smeringurus Mesaensis Vaejovidae, Hadrurochactas). La civilisation décrite, en vingt pages seulement, est tout à fait crédible. Un joli tour de force. En dehors de ces quatre petites pépites, j'ai remarqué deux belles nouvelles sur le thème de l'arche stellaire, Sous le voile de l'oubli, de David Osmay, et Le monde que nous attendions de Valérie Simon. Celle-ci relate l'arrivée, après dix-huit générations, de seize millions d'humains, sur une planète habitable. Leurs rêves s'incarnent dans le personnage principal, choisi pour mettre pied à terre. La fin est hélas un peu décevante. Citons encore On a marché sur le marchand de sable, d'Olivier Morvan, où l'on s'interroge sur l'origine d'une empreinte de pied gigantesque, ou Un pas en avant, deux pas en arrière de Jérôme C. Carayol : ici, l'humanité en a tellement marre de chercher des planètes habitables qu'elle finit par créer des « Cubes » artificiels pour calmer les attentes, jusqu'au jour où...
Bref, voici un ensemble d'excellents textes, dont les auteurs - vrais raconteurs d'histoires - méritent tous d'accomplir une belle carrière. Je rappelle leurs noms : Hans Delrue, Loïc Weissbart, David Osmay, Julien Morgan, Jérôme C. Carayol, Cécile Luherne, Olivier Morvan, Valérie Simon, Cédric Burgaud et Romain Jolly.
On a marché sur..., anthologie dirigée par l'association ForgeSonges, Éditions Voy'(el), illustration de Yvan Villeneuve, ISBN 978-2-364750-84-5, 249 p., 20 euros
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