Semper Lupa

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Vous avez aimé Roma Aeterna de Robert Silverberg ? Vous adorerez Semper Lupa de Meddy Ligner. Cet écrivain français, né en 1974, reprend la même uchronie de base : l’Empire romain existe toujours. Quant à la forme, il copie tout à fait Silberberg : il divise son roman en chapitres datés suivant la chronologie romaine, ab urbe condita, soit « depuis la fondation de la ville », établie en 753 avant Jésus-Christ. Pour obtenir la date du calendrier chrétien des différents textes, il suffira donc de soustraire 753 à la date donnée. Ceci dit, quant au fond, les deux romans reposent aussi sur une même donnée, la non émergence des deux grandes religions futures, le christianisme et l’islam. En 6, Jésus, un superbe adolescent d’une douzaine d’années, est assassiné par un serial killer qui se prend pour le bras armé de Jupiter. Suit le point de divergence : après la mort prématurée de son fils Commode, suite à une chute de cheval, Marc-Aurèle désigne, pour lui succéder, Claudius Pompeianus. Dans la vraie histoire, ce général aida Commode lors de son accession au trône, puis, accusé de complot, se retira. Pressenti par Pertinax pour lui succéder, il finit par prendre sa retraite. Ici, il est à l’origine d’un deuxième apogée de l’Empire.

Reprenant la tradition des Antonins, les empereurs suivants adoptaient à chaque fois les personnalités qui leur semblaient les meilleures : ce fut le règne des cinq Valériens, qui rédigèrent les Tables Valériennes, renforçant le pouvoir du Sénat et diminuant celui des légions. Celles-ci, en 1364 (611), éliminèrent les armées d’un chef charismatique en Syrie, qui voulait diffuser une nouvelle foi : « et on n’entendit plus jamais parler de leur religion... ». Comme Silverberg, Ligner commence alors, et avec brio, le récit du déroulement de cet Empire romain alternatif. Neuf chapitres parcourront l’Histoire. Les Romains iront, par exemple, en Russie, où ils construiront un « Grand Mur de l’Est », comme celui d’Hadrien en Ecosse. Dans ces contrées barbares, un héros rencontrera une femme-louve. En 2023 (1270), Rome affronte les Mongols d’Ögödei, fils de Gengis Khan, en Pannonie. Le récit du soldat irlandais sur le champ de bataille, magistralement conduit, provoque une certaine émotion. En 2102 (1349) eut lieu la grande et effroyable épidémie de peste noire, bien décrite. Plus tard, un empereur, Sulpicius, décida d’explorer l’Antarctique, expédition qui tourna au désastre. Ce récit évoque un épisode similaire dans les Chroniques de Majipoor, de Silverberg, décidément fort présent. Rome découvre l’Amérique et y fonde une colonie, Nova Italia. En 2563 (1810), la révolte gronde, les terroristes sont partout, et un sénateur ouvert aux réformes, au nom bien choisi de Spartacus Gracchus, trouve la mort dans l’explosion d’un train vers Cracovie. Dix ans après, le système impérial s’effondre : lui succède la Seconde République. Après avoir détruit une révolution en Amérique à coup de bombes nucléaires, Rome s’engage dans la course à l’espace...

 

Tout cela se lit avec très grand plaisir. Meddy Ligner s’était déjà signalé par un premier roman, Les roses de Karakorum, une uchronie mongole, parue en 2014 aux mêmes éditions. Il est aussi anthologiste chez « Rivière Blanche ».

 

Meddy Ligner, Semper Lupa, L’histoire éternelle de Rome, 2017, Editions Armada, ISBN : 979-1090931-91-6, illustration de couverture de Michel Borderie, 227 p., 14 euros.

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