Quatre morts et un papillon

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Quatre femmes. Loubna, droguée, prostituée dans un bar miteux, trainant sa misère pour un fix, accepte de servir de mule pour un caïd de la région parisienne. Magali, violée et enceinte, décide de garder l’enfant illégitime contre l’avis de tous, surtout de son mari, parce que ça fait des mois qu’elle essaie de mener une grossesse sans y parvenir. Johanna, sauvagement agressée et tailladée, quasiment laissée pour morte dans les souterrains de l’aéroport, le visage balafré à jamais d’une immense plaie qui lui ouvre les deux joues, vire lentement dans la psychose. Et Chloé, épouse délaissée d’un mari alcoolique, mère de deux enfants en bas âge, qui noie son mal-être dans la bouffe . Ces quatre femmes ne se connaissent pas, n’ont a priori aucune raison de se connaître. Sauf que… Le destin malin, et tout le talent de l’auteure, va les mettre en relation par des chemins détournés. Toutes ont au moins un point commun: elles cherchent le bonheur, ou plutôt un semblant de bonheur, à des degrés divers et selon une définition qui leur est propre. Si Loubna voudrait s’en sortir et quitter le monde de la drogue, Magali n’aspire que être une bonne mère pour son enfant, Johanna voudrait pouvoir dormir et Chloé reprendre sa vie en mains pour le bien de ses petits. Avec talent, Valérie Allam leur laisse entrevoir chaque fois un bref aperçu du bout du tunnel, mais ce n’est qu’une illusion. Ces quatre femmes sont des Sisyphe des temps modernes, condamnées à faire rouler la pierre de leur désespoir sur la pente de leur destin.

Difficile de croire, en lisant la page 4 de couverture, qu’il s’agit d’un premier roman, tant le livre de Valérie Allam est puissant de noirceur et de maîtrise. N’y cherchez pas d’enquête policière, ce n’est pas le but. Quatre morts et un papillon n’est qu’un instantané d’une société qui part à la dérive, loin du clinquant et de la beauté.

Le papillon, vous comprendrez de quoi il s’agit en ouvrant les pages de ce livre. Quant aux quatre morts… S’il y a effectivement des morts violentes, il faut voir au delà, les quatre morts étant aussi celles, figurées ou non, des quatre héroïnes malgré elles de l’histoire déroulée sous nos yeux. Avec, en guise de conclusion, une fin douce-amère, implacable.

Moralisateur, culpabilisant ? en aucun cas. On ne peut sans doute pas sauver tout le monde…

Un nouvelle réussite parue aux Editions du Caïman, dont je suis toujours autant accro aux couvertures me rappelant la défunte collection Carré Noir.

 

Quatre morts et un papillon - Valérie Allam - Editions du Caïman, 2018, 13 €

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