Provenance

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Ce roman se situe dans le même univers que la trilogie de l’Ancillaire, mais nous donne un point de vue assez différent. Il dissout l’impression qu’on pouvait avoir eue d’un empire du Radch qui aurait avalé toutes les communautés humaines et qui en serait devenu le représentant de l’Humanité dans son ensemble face aux Presgers, puisque nous avons ici, plus ou moins affectées par le Conclave convoqué à la suite de la déclaration d’indépendance des IA, plusieurs communautés humaines, dont celle de l’héroïne, Ingray Aughskold, en train de s’affronter à propos du contrôle de certaines portes. Et celle-ci, croyant s’attaquer à une petite question de politique interne de sa communauté, va se trouver prise dans un conflit où interviendront non seulement plusieurs communautés humaines, mais aussi celle des Gecks, êtres marins qui ont accepté d’accueillir certains humains modifiés sur leur planète, tout en refusant toute autre interaction avec les humains, grâce au traité Presger.

 

L’histoire extrêmement mouvementée et le passage de l’héroïne d’une adolescence difficile à l’âge adulte servent, également, à introduire un certain nombre de réflexions sur les sociétés humaines et non humaines qui prouvent qu’Anne Leckie est prête à égaler Carolyn J. Cherryh dont on n’oublie pas combien de sociétés surprenantes elle a su créer.

Et comme CJ Cherryh, Anne Leckie sait mettre en scène des personnages masculins ou féminins non sexistes et rappeler un féminisme militant dans son écriture. L’emploi de trois genres – les genres masculins et féminins usuels pour parler de frères, sœurs, fils et filles des personnages, tout en employant un troisième genre que j’appellerai épicène plutôt que neutre, avec la terminaison ae aux noms et adjectifs et le pronom iael pour les personnages dont le sexe n’intervient pas explicitement dans le récit –, est semble-t-il lié à la langue de l’héroïne, le bantia, distinct du Radch. Même si nombre d’autres travers de notre mode de pensée semblent avoir atteint le lointain futur où se déroulent ces histoires, le suprématisme masculin semble oublié dans toutes les communautés évoquées.

 

Provenance, par Anne Leckie, traduit par Patrick Marcel, J’ai Lu, coll. Nouveaux Millénaires, 2018.,415 p., 20€, ISBN 978-2-290-15546-2

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