Martiens, go home !

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Les Martiens de Fredric Brown ont, certainement, pulvérisé à leur arrivée les limites de l’humour en science-fiction. Et il est hors de doute que, pour tout nouveau lecteur, ils ont conservé cette capacité de dépasser les limites de l’attendu.

Peut-être fragments matérialisés de l’imagination du personnage principal, Luke Devereaux, auteur de science-fiction en mal d’inspiration, auquel cas le roman comporterait en plus une mise en abyme fort joliment rappelée dans la postface de l’auteur. Peut-être expression d’une réalité qui violerait les règles connues, ce milliard de petits hommes verts qui apparaissent soudainement dans le monde entier pour perturber toutes les activités humaines, mais par dessus tout pour rendre impossible toutes celles qui reposent sur le secret ou sur le mensonge. Ils réalisent en fin de compte une utopie grinçante en mettant à mal tous les systèmes, à commencer par ceux qui reposent sur mensonge et secret (par exemple le communisme), mais aussi les modes de vie traditionnels (chasseurs d’Afrique).

 

Ce que ne dit pas le roman, et qui ne serait certainement plus l’objet d’un roman d’humour, c’est comment le monde repartira après cet intermède bouffon (pour les lecteurs, en tout cas)... Mais Brown, comme tout moraliste, se borne à mettre le doigt sur un certain nombre d’absurdités et d’immoralités du monde, mais ne fournit pas des règles de morale et de vie. Critique acerbe du monde existant, mis à mal par ce milliard d’Asmodées[1] verts, Martiens go home ! ne prétend pas construire l’utopie du monde meilleur qui, peut-être, aura une chance d’apparaître après la fin du roman...

 

Un roman qu’il est indispensable d’avoir lu au moins une fois, qu’on a plaisir à relire, et qui n’a en rien perdu son pouvoir d’amusement et de réflexion critique.

 

Martiens, go home! de Fredric Brown, traduit par Alain Dorémieux, Folio SF n°6, nouvelle édition 2016, 216 p., couverture de Frederik Peeters, F5, ISBN 978-2-07-07793-8

 

[1]     Référence au Diable boiteux de Le Sage, qui, après tout, agit de manière fort proche de celle des Martiens de Brown, mais en diffère de façon profonde par sa volonté moralisatrice exprimée.

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