MONFILS Nadine 02

Auteur / Scénariste: 

Critique de "Vacances d’un sérial killer" ici.

Dans ce roman, tu sembles tout tourner en dérision, une vieille dame, les riches qui s’y croient, le couple, l’adolescence, etc. Tu ne prends donc rien au sérieux ?

Non. On peut avoir le sens de la dérision. La dérision, c’est une manière de travestir parfois les choses qui nous touchent profondément, de leur mettre un habit de couleur pour qu’elles aient l’air moins triste. Quand j’ai écrit la pièce, « La Vieille Folle », à l’époque j’ai eu un retour de flamme car on me reprochait de me moquer des Belges. Il y avait l’accent bruxellois, que j’adore. Pour moi c’est un hommage, ce n’est pas me moquer. Le Belge a toujours eu un petit complexe d’infériorité, surtout par rapport aux Français. Ils ont peur que les Français se moquent d’eux, alors que c’est tout à fait l’inverse qui se passe. Les Français adorent la belgitude et ne se moquent pas du tout de nous. Ils nous trouvent géniaux, attachants, drôles.

J’aime garder ma Belgique à moi, celle que j’aime. Avec les gens populaires, un peu entre strip-tease et les Deschiens. Des gens pour qui j’ai une infinie tendresse. C’est aussi ça le travail d’un écrivain ou d’un dessinateur, de décrire les choses dans leurs paroxysmes, dans des couleurs très vives parce que c’est plus amusant.


Tu as l’air de t’être follement amusée à écrire ce livre, est-ce ton leitmotiv quand tu te lances dans une histoire ?

Oui, de toute façon, si je ne m’amuse pas, je n’écris pas. La vie est trop courte et c’est un métier qui n’est pas facile pour en vivre. Je n’ai jamais eu trop de problème pour trouver un éditeur, mais je suis assez réaliste pour me dire que cela pourrait finir si un jour mes bouquins ne se vendaient plus.

J’avais demandé à mon ami Jaco Van Dorrmael s’il avait une recette pour réussir mon film. Il m’a dit qu’il n’y en avait qu’une seule : prendre du plaisir à faire les choses. Et il a raison, car on ne sait jamais ce que peut devenir la vie. Alors je prends beaucoup de plaisir à écrire un bouquin comme ça, plein d’humour noir, je m’éclate bien. J’aime bien aller vers les ténèbres, mais là, j’avais besoin de vacances.

La Côte belge te fascine, tu l’aimes ?

J’adore la Côte belge. Ce sont les souvenirs d’enfance, les babeluttes, les fleurs en papier crépon, les boules de l’Yser. Je déteste par contre les buildings. Les promoteurs ont rasé toutes les petites maisons qu’il y avait à Ostende. Quand je vais à la mer, je tourne le dos à ces affreux buildings et quand je suis face à cette mer grise et tourmentée, il y a un flot de souvenirs qui me revient ; j’entends Brel et Arno et je vois les peintures de Spilliaert que j’adore. C’est ça, ma mer à moi… Elle me parle plus qu’une mer bleue !

Quand j’étais petite, je passais mes vacances à Ostende, Blankenberge… J’ai un coup de cœur particulier pour Blankenberge. Cette ville a gardé une couleur, des parfums qui me rappellent mon enfance.

Les serial killers aussi…

Ce sont des personnages extrêmes. Ils me fascinent parce que je ne les comprends pas, je ne sais pas comment on peut être comme ça. Je vais donc aller chercher pourquoi. Et il faut chercher qui a mis le couteau dans la main de la personne qui tue. Quand on lit la vie des serial killers, la plupart ont eu une enfance de merde. Si j’avais eu une enfance comme ça, qu’est-ce que je serais devenue… Ce n’est pas les excuser, mais c’est essayer de comprendre. J’ai toujours aimé le polar car ça raconte une histoire, ça parle de faits divers, donc fatalement, il y a des tueurs.

Tu revendiques ta belgitude à travers ta manière d’écrire, tes expressions. Es-tu fière d’être belge ?

Très fière oui ! Sincèrement, je ne voudrais pas avoir une autre nationalité sur cette terre. J’adore tout ce qui fait que l’on peut aimer la Belgique. Et malgré tous nos problèmes, j’espère qu’on ne sera jamais rattaché à un autre pays. Il faut qu’on garde notre identité. J’aime beaucoup la France, mais je n’imagine pas du tout que la Belgique lui soit rattachée. Je n’ai jamais voulu prendre la nationalité française alors que je le pourrais, vu que je suis mariée à un Français. Affectivement je ne pourrais pas.

Est-ce que tuer un assassin c’est commettre un crime ?

Effectivement c’est commettre un crime, on se met au niveau de celui qui tue. Mais si ça peux éviter que cette personne en commette d’autres… Si j’avais pu tuer Hitler, je l’aurais fait.

On quitte totalement Pandore et les inspecteurs Lynch et Barn, de tes précédents romans, les retrouvera-t-on un jour ?

Je n’en sais encore rien. C’était une trilogie, mais on pourrait en faire des personnages récurrents comme l’inspecteur Léon. J’aime bien, car ils deviennent familiers et les gens aiment retrouver des personnages auxquels ils peuvent se raccrocher. Pour le moment, ce n’est pas dans mes projets, mais la porte n’est pas fermée.

Un projet de film en cours ? Celui-ci pourrait être adapté facilement.

J’ai mis sept ans pour monter « Madame Edouard » avec pourtant, dès le départ, un casting hallucinant : Michel Blanc, Didier Bourdon, Dominique Lavanant, Josiane Balasko, Annie Cordy… Et pour le nouveau projet « Nickel Blues », j’ai Emilie Dequenne, Dominique Pinon, Dominique Lavanant, Annie Cordy, une musique d’Arno… Je me suis déjà fait refouler par la commission ici en Belgique. On ne m’a jamais donné un centime pour faire mon film. Pour le moment, j’ai un producteur luxembourgeois qui est intéressé. J’aimerais le monter ici, à la Côte belge, mais si jamais nous n’avons pas assez de sous, j’ai écrit une version qui se passe en Thaïlande… Par exemple, « Madame Edouard » devait se faire à Montmartre, mais je n’ai pas pu le tourner là, car Jean-Pierre Jeunet (que j’adore) venait de réaliser « Amélie Poulain », alors je l’ai transposé au marché aux puces de Bruxelles. Et ça fonctionne très bien, parce que c’est la même folie. En Thaïlande, qui est un pays que j’aime particulièrement, il y a cette folie, différente de la nôtre, mais bien barrée aussi.

Quels sont tes projets littéraires ?

J’écris déjà la suivant… Je suis une boulimique. Je suis un peu comme les gens qui ont un mégot qui se termine et qui en allume un autre… J’ai besoin constamment de replonger dans le monde de l’écriture. De tout le temps avoir des projets. Ce sera très noir, un mélange de contes de fées et de thriller.

Si j’étais

- un livre

Le Tao au jour le jour de Deng Ming Dao.

- une loi

Je déteste la loi. Si j’en étais une, je serais pour l’abolition des lois, mais je ferais en sorte que chacun ait ce à quoi il a droit, ce qui diminuerait la violence.

- Dieu

J’espère ne jamais le devenir car il doit avoir énormément de boulot…

- Le Père Noël

Je me verrais bien en travelo et j’irais voir ce qui se passe chez les gens.

- Une chanson

Amsterdam de Brel.

- Un acteur

John Malkovich.

- Un homme

J’adorerais être un homme. Et je serais homosexuel.

- Un conte pour enfants

La petite fille aux allumettes.

- Un tueur en série

Là j’aimerais peut-être devenir Dieu, juste quelques secondes pour ne pas devenir un tueur en série.

- Une chanson belge

« Ca ira mieux demain » d’Annie Cordy. Et dans un autre registre, « Les yeux de ma mère » d’Arno

- Le roi des belges

Le pauvre. Comme pour Dieu, je zappe…

- Une déesse

Ça doit être ennuyeux. Tu vis constamment avec un miroir à te regarder le nombril…

- Une recette de cuisine

Des boulets sauce tomate avec des frites.

- Un coffre-fort (qui contiendrait quoi ? )

Il contiendrait du bonheur à donner aux autres.

- Une porte (qui s’ouvrirait sur quoi ?)

Sur un grand fou rire.

- Un souvenir

J’en ai tellement des souvenirs… (longue réflexion)

Quand j’avais 5 ans, je marchais avec mon papa qui me serrait la main. Il avait un chapeau qui lui donnait l’allure d’Humphrey Bogart.

- Annie Cordy

Annie, c’est une bouteille de champagne, c’est un Magnum… Je prendrais sans doute des vacances et j’irais à la mer avec mes chiens.

- Un événement à changer dans le monde, dans ta vie

J’aimerais que tous les hommes s’entendent, mais c’est complètement utopique. J’essaierais qu’ils comprennent qu’on est en train de détruire la planète, de la polluer.

Et dans ma vie, j’aimerais donner à mon mec les moyens de ne plus bosser pour qu’il se consacre à ses incroyables sculptures.

- Ton chien

Mais je suis mon chien ! J’ai un mimétisme absolument affolant avec lui. Là mon petit chien s’appelle Léon (comme mon commissaire) et j’en suis complètement gaga. J’ai même pris un de ses jouets avec moi…

- Un alcool

Une Orval.

- Un attentat

Je ferais péter tous les buildings de la Mer du Nord.

- Une gourmandise

Une sucette à la rose. Non, une babelutte…

- Une invention

Une machine à détecter les cons…

- L’inspecteur Léon

Je continuerais à tricoter.


- Un tableau

Léon Spilliaert ou Magritte.

- Un complexe

Si tu as des complexes, c’est que tu es mal dans ta peau. Or, je me sens bien dans la mienne.

- Un paysage

La Mer en hiver ou Bangkok.

- Un jeu d’enfant

La toupie.

- Un super héros

Flupke.

- Un médicament

Je n’en prends jamais…

- Un être mythologique

David, de David et Goliath.

- Une épitaphe

Les arbres ne sont pas faits pour souligner les étoiles.

- Vin rouge ou vin blanc ?

Bière surtout.

- Cauchemar ou rêve ?

Les deux.

- Oreiller ou traversin

Oreiller.

- Montagne de chantilly ou saucisson de montagne ?

Ni l’un ni l’autre. Quoi qu’un bon saucisson aux herbes de Provence…

- Vanille ou patchouli ?

Vanille.

- Saut à l’élastique ou transat et chapeau de paille ?

Chapeau de paille.

- Un grand regret ?

J’en ai plusieurs.

De ne pas avoir écouté mon fils aîné quand il m’a dit de quitter mon deuxième mari. Les regrets sont souvent des marques de faiblesse. Si on y pense trop, on se bourre d’ondes négatives. Faut avancer !

- Un écrivain qui t’impressionne ?

Marcel Moreau.

- Avec qui es-tu fâchée dans le milieu littéraire ?

Avec personne. Quand j’en ai marre, je me casse, c’est tout.

- Le film que tu pourrais revoir 1000 fois ?

Orange Mécanique.

- Ta dernière indignation ?

La France qui a diminué le budget pour les écolos. Ils auraient pu faire ça avec l’armée, mais pas avec des causes aussi importantes que la sauvegarde de la planète. Il faut avoir une conscience des urgences.

- Ton doudou d’enfant ?

Mon pouce… et je le suce toujours…

- Jamais eu envie de coller une grande tarte dans la g… de quelqu’un ?

Oh si, souvent… Il m’est déjà arrivé de me lâcher…

- Ton cri de guerre ?

Youpie !

- Le milieu littéraire est formidable parce que…

Parce que c’est une bande de faux-culs. Ca me fait rire !

- Le milieu littéraire est insupportable par ce que…

Parce qu’il y a beaucoup de monde qui se regarde le nombril et l’étale en long et en large dans des bouquins qui me tombent des mains. Je préfère mille fois le polar. Ca, c’est ma famille.

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