Chiens de paille (Les)

Auteur / Scénariste: 
Traducteur: 

Avant d’être un film de Sam Peckinpah, Les chiens de paille (titre original The Siege of Trencher’s Farm) est sans doute le roman de Gordon Williams le plus connu par le grand public, auteur écossais d’une vingtaine de titres dont From Scenes like This. Son adaptation libre fait partie des films emblématiques de l’ultraviolence cinématographique des années 70. Le personnage principal, George Magruder, professeur américain de littérature, s’isole en compagnie de sa femme Louise et de sa fille dans un petit village des Cornouailles. Il a pour but d’écrire une biographie mais aussi de permettre à son épouse de retrouver ses racines. Malgré ses efforts, George est difficilement accepté par la communauté locale, faite de personnages frustes, sans doute consanguins, volontiers portés sur l’alcool, qui voient d’un mauvais œil un étranger ayant les moyens louer une maison comme pour mieux les narguer. Ils sont aussi dépositaires d’un lourd secret, celui d’un assassinat commis il y a longtemps sur un soldat infanticide.

Un soir d’hiver, en pleine tempête, Henry Niles, un simple d’esprit détenu à vie pour le meurtre de deux fillettes, s’évade au cours d’un accident de la circulation. Perdu, errant, il est percuté par George qui revient d’une fête du village où sa femme a tenté de s’immiscer. Blessé et inconscient, Niles ne peut pas répondre aux questions de Magruder qui l’emmène chez lui en attendant le médecin. Mais au village, la fête tourne au drame avec la disparition d’une fillette. Lorsque les villageois apprennent que Henry Niles s’est réfugié à la ferme Trencher, ils décident de s’y rendre et de faire justice eux-mêmes, comme leurs aïeuls. Quitte à supprimer tous ceux qui se mettront sur leur chemin…

La question essentielle qui constitue la trame de ce récit tient finalement en une phrase : à quel moment la violence est-elle justifiée ? Car George est un pacifique qui fuit le moindre conflit et a tendance à rejeter la faute sur autrui avec une évidente mauvaise foi. C’est d’ailleurs ce qui a conduit son couple au bord de la rupture. De la même façon, après avoir découvert l’identité du blessé, il estime qu’il ne mérite pas le sort qu’on s’apprête à lui faire subir. Cependant, devant la haine des villageois, c’est la vie de sa femme et de sa fille qui est en jeu et qui va le pousser à devenir comme ceux qui l’assiègent. Sa riposte sera à la hauteur : un déferlement de violence.

Peckinpah avait pris quelques libertés avec le roman, en particulier la femme de l’écrivain qui est une ancienne petite amie d’un autochtone et une scène de viol pas véritablement indispensable pour le déroulement de l’histoire. Gordon Williams ne donne pas cette explication. Jusqu’où l’homme dit civilisé peut aller pour se protéger lui et les siens ? Un roman forcément très dur, âpre, qui déroute le lecteur et cherche à modifier son rapport avec le bien et le mal.

Je remercie les éditions Folio pour leur confiance

Gordon Williams - Les chiens de paille - Éditions Folio policier - juin 2024, 8,30€

Type: