Swastika Night

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Ce roman, paru en 1937, n’est donc pas une uchronie, mais une anticipation non réalisée. Comme le roman paru en 1936 de Sinclair Lewis, Impossible ici, traduit dès 1937 par Raymond Queneau et publié par Gallimard, réédité récemment par La Différence, elle évoque un avenir dans lequel le nazisme aurait conquis le monde. Ou plutôt ici seulement l’Europe, l’Afrique et une partie de l’Asie, le reste du monde étant dominé par l’Empire japonais. Nous sommes en fait 7 siècles après Hitler et la religion hitlérienne qui domine donc la moitié du globe a été mise au point un siècle plus tard par un certain von Wied qui a mélangé au culte du Sang et de la Race la gynophobie de Saint Paul et tous les défauts de l’intégrisme religieux chrétien, même si, depuis l’extermination complète des juifs, les chrétiens sont devenus les nouveaux parias.

Le roman raconte donc comment, à l’occasion d’un « pèlerinage » sur les lieux saints du culte hitlérien, en Allemagne, un Anglais, qui est, en fait, incroyant et voudrait militer pour la libération de son pays, va se voir présenter, puis remettre, des documents sur l’histoire réelle du passé. Et comment il va envisager, à long terme, d’utiliser ces documents pour préparer une révolte.

 

Pas plus que le roman de Sinclair Lewis ce roman ne se termine sur la réussite de la révolte : nous sommes encore sous le joug avec un faible espoir d’une libération future, lointaine. La boite de Pandore a été ouverte par Hitler, et seul l’espoir est resté aux hommes...

 

D’une certaine façon cette dystopie mélange à la tyrannie nazie une pseudo-religion qui doit plus au caractère sexiste d’un certain christianisme qu’aux dogmes nazis. D’accord, le nazisme entendait remettre la femme à ses places : la procréation, la cuisine et le ménage, et l’église (Kinder, Küche, Kirche) mais le traitement des femmes imaginé par von Wied, leur Réduction, les a ramenées à un état bestial dans lequel elles ne servent plus qu’à enfanter, de préférence des garçons, et de ce fait sont en train de disparaître. Si le thème sexiste n’est évoqué que dans une partie du livre, il n’en est pas moins important.

 

Plus que dans le débat classique sur le nazisme, c’est sans doute dans celui sur le sexisme que ce livre présente une grande originalité et un grand intérêt. Il pose le problème, montre un extrême insupportable, mais plus ou moins sous-jacent à certaines attitudes, souvent liées aux «religions révélées », et ne prétend pas en proposer des solutions. Sur ce thème aujourd’hui encore plus polémique que celui du nazisme, il devrait être ajouté au débat.

 

Swastika Night, de Katherine Burdekin, traduite par Anne-Sylvie Hamasset, Éditions Piranha, collection Incertain Futur, 2016, 239 p., 17€90, ISBN 978-2-37119-052-8

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