Signe particulier : transparente

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Être transparente au lycée, rarement invitée en soirée et ignorée dans sa propre famille, c’est une blessure, ça fait mal. Mais être invisible pour de vrai, se rendre en salle des profs incognito et disparaître dans les moments embarrassants… ça commence à devenir beaucoup plus intéressant !

À quinze ans, Esther cesse d’être une fille ordinaire et voit un nouveau monde s’ouvrir à elle. Pour l’adolescente trop discrète, la vie devient soudain passionnante. Et de plus en plus dangereuse.

 

Mon avis

Le premier chapitre de cette histoire nous donne un indice sur le scénario. En effet, nous avons affaire à une narration externe, laquelle nous amène à suivre Esther, l’héroïne du roman. Mais pas que… De temps à autre, au détour d’une page, d’une scène, d’un début, d’un milieu ou d’une fin de chapitre, l’autrice nous offre le point de vue d’un personnage mystérieux à la première personne. Cela incite un peu à se poser quelques questions : de qui s’agit-il ? Est-ce cette personne qui nous narre l’histoire d’Esther ? Verra-t-on ce personnage apparaître ?

Plus l’histoire avance, plus des réponses sont données, traînant d’autres questionnements dans leur sillage. Nathalie Stragier ne cesse de titiller notre curiosité, donnant ainsi l’envie irrésistible de tourner chaque page, d’en dévorer le contenu. Le fil conducteur paraît un peu flou au début, mais c’est compréhensible, puisqu’il faut un peu de temps pour que l’histoire se mette en place. L’autrice prend la peine de nous montrer le quotidien de sa protagoniste, jusqu’à nous insérer dans ses pensées. On se sent étouffé par le mal-être d’Esther, la solitude qu’elle éprouve face à ces gens qui ne veulent pas la voir, faire attention à elle, même quand elle essaie de rappeler son existence aux autres.

Cela mène avec logique à l’élément déclencheur, celui qui fait tout basculer. Comme il est mentionné dans le résumé, vous vous doutez qu’Esther devient invisible pour de vrai. La subtilité avec laquelle ce changement s’imbrique dans l’histoire m’a impressionnée, tant cela paraît naturel. Nathalie Stragier parvient, d’une main de maître, à insérer le côté fantastique dans ce récit qui, aux premiers abords, semble jeunesse et contemporain. Un mélange intéressant s’opère : une tournure magique et cohérente. Du piment s’ajoute à ce met exquis, rendant ainsi l’histoire plus palpitante. C’est là qu’elle entre en mouvement, que des péripéties s’enchaînent et que certaines vérités éclatent ! Des messages passent, une magnifique histoire se crée, mais… seriez-vous capable de maîtriser un don impliquant de grandes responsabilités, mais surtout, un choix qui pourrait tout changer ? Pour le savoir, à vous de vous faire votre propre avis, mais pour cela, il faudra lire l’histoire d’Esther !

 

Une certaine légèreté découle de la plume de Nathalie Stragier, comme le sucre ajouté au café noir. Une belle métaphore pour résumer l’ampleur que prend ce récit au fil des pages qui se tournent. L’autrice utilise un vocabulaire, à la fois riche et simple, permettant ainsi au lecteur de rester accroché à l’histoire, même quand le contexte s’avère un peu plus calme. Des dialogues rythmés ponctuent la narration avec ardeur, ce qui rend le texte très vivant. J’apprécie les longues phrases alambiquées et les tournures (parfois trop) recherchées, mais les phrases courtes et sans chichis peuvent tout autant me tenir en haleine. Et puis, ça reste du jeunesse.

 

Un livre jeunesse à ne pas rater, peu importe votre âge ! Amateurs ou non de ce genre, cette histoire en vaut la peine.

 

Comme je le disais, les dialogues apportent du rythme à l’histoire, mais ils n’existeraient pas sans les personnages qui en sont à l’origine. Ceux-ci, tous très intéressants, apparaissent au bon moment dans le récit. Même si des personnages secondaires sont vraiment relégués au dernier plan, ils n’en restent pas moins plein de potentiel et le fait que Nathalie Stragier ne les approfondisse pas tous n’est absolument pas dérangeant. Elle distille parfaitement les interventions de ses personnages. Il y a pas mal de personnages, mais je vais essayer de ne rester que sur Esther et Godeleine, parce que ce sont deux personnages qui m’ont touchée.

La première, je l’ai évoquée plus haut, et vous l’aurez compris : il s’agit de l’héroïne. Dès le début, la narration suit cette lycéenne, nous faisant pénétrer dans son quotidien morne. Au vu de la transparence qu’elle vit chaque jour, Esther est souvent timide, facilement abattue, elle se compare énormément à sa meilleure amie. Elle n’a aucune confiance en elle, aussi. Tous les symptômes d’une transparente. Bien qu’elle tente de vivre avec, on sent que ça lui pèse et ça m’a fait mal au cœur de lire les premières pages du livre. Ce n’est pas du harcèlement qu’elle vit, mais carrément autre chose, une sorte d’indifférence. J’ai été admirative de la voir évoluer, mais surtout, j’ai apprécié son authenticité, son humanité. L’autrice n’a pas cherché à la rendre victime, elle n’en a pas fait une Mary-Sue : elle dépeint avec réalité une situation qu’elle a vécue. Et ça, ça se ressent à travers ses mots. Nathalie Stragier ne nous dévoile pas seulement le caractère de son personnage principal, mais un pan de sa vie, d’elle-même. Elle se confie à nous.

À côté d’elle, nous découvrons également un individu intéressant : Godeleine. Une femme étrange, ayant l’air jeune et vieille en même temps, dénuée de tact. Au début, je ne savais pas quoi penser de ce personnage. Elle me laissait mitigée. Non, même pas mitigée, plutôt indécise ! Je n’avais aucun avis sur elle, j’étais même incapable de m’en faire un. C’était abominable… Un gros trou au niveau de ses interventions. Et puis, mon opinion s’est construite au fil de l’avancée du récit. J’ai commencé à l’apprécier, puis à l’adorer. À sa manière, elle est touchante et très authentique aussi. Même si elle arbore une aura surnaturelle, elle s’avère très humaine. Comme je le disais, son côté un peu trop honnête peut déplaire, secouer, déboussoler, mais à côté de ça, elle est très attachante, intéressante. Le genre de personnage qu’on veut à tout prix prendre dans ses bras, à l’instar d’Esther. J’ai aussi remarqué que Nathalie Stragier donnait des défauts à ses personnages, mais je les ai tellement appréciés, qu’ils se sont transformés en qualités. Des individus purement réels, vivants, vrais. Comme je le disais plus haut, même si vous n’êtes pas très « roman jeunesse », il s’agit là d’un ouvrage émouvant qui vous fera oublier ce détail, principalement par la présence de personnalités diverses et captivantes.

 

La fin de l’histoire prend une tournure sur laquelle je ne prononcerai pas, de peur de spoiler. Sachez seulement qu’elle vous fera vibrer, autant que le reste de l’histoire, si ce n’est davantage. Beaucoup de révélations et de situations nous happent, jusqu’à nous oppresser. Elles se referment autour de nous, tel un étau. On souffle, on coupe sa respiration. Malgré l’appréhension et notre envie de pleurer, on tourne les pages. On ne s’arrête pas. Envers et contre tout, l’envie de connaître la conclusion de l’histoire contrôle chacun de nos gestes. Enfin, la phrase finale nous heurte de plein fouet, et c’est à vous de décider si cela vous plaît ou non. Dans tous les cas, attendez-vous au meilleur… ou au pire !

 

Grosso modo, Signe particulier : Transparente est une lecture jeunesse agréable, d’abord contemporaine, puis pigmentée de fantastique. L’autrice nous emmène sans mal dans une intrigue originale, où personnages attachants, secrets et révélations s’entrechoquent, au point de nous rendre émotif. Ponctuée d’une plume légère, au vocabulaire tantôt riche, tantôt simple, l’histoire d’Esther saura émouvoir votre cœur de lecteur. Pour cela, il vous suffit de vous détendre, de laisser vos doigts tourner les pages, de permettre à vos émotions de vous guider. Une aventure vous attend… incroyable ou dangereuse ? Un peu des deux ? Ce sera à vous d’en décider !

 

Signe particulier : transparente par Nathalie Stragier, Syros, 309 pages.

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