Dimensions fantastiques (Les)

Il est bien agréable de disposer, en un unique volume, des quatre Librio publiés de 1996 à 2007 sous le titre « La dimension fantastique ».

Intelligemment préfacé par la maître d’oeuvre Barbara Sadoul, ce bel ouvrage parcourt le Fantastique en 26 récits, connus ou moins connus. L’intérêt pour le néophyte est évidemment de lire tous ces textes en une fois, faisant d’emblée connaissance avec des textes majeurs. Attention, il s’agit ici d’abord de fantastique ’canonique’, donc de fantastique éloigné de l’horreur ou de la fantasy, et ensuite de fantastique ’ancien’. En effet, seules les cinq dernières nouvelles proviennent du vingtième siècle.

Nous partons donc d’un lai de Marie de France (Bisclavret) pour parcourir tout l’historique du genre, essentiellement français en plus (17 sur 26). Voilà le trajet balisé. Ceci étant dit, les merveilles abondent. Il faut évidemment commencer par L’Homme au sable de E.T.A. Hoffmann, père absolu du genre. Les Germaniques sont profondément fantastiques, comme le démontre aussi La Montre du doyen du duo alsacien Erckmann-Chatrian. Tous les grands noms de la littérature française sont présents (hormis Mérimée, tiens) : Balzac, Gautier, Flaubert, Hugo, Nerval, Daudet, Baudelaire, Sand, Maupassant, Zola, Jules Verne... ils se sont tous adonnés aux effrois du mystère, souvent avec bonheur. Et puis quelle joie de lire un style français des plus châtiés : Angeline de Zola, par exemple (fantastique expliqué à la gothique) est un vrai bonheur de lecture, tout comme l’étrange et tourmenté Rêve d’enfer de Flaubert ou La Chevelure de Maupassant.

Parmi les non-Français, épinglons Fitz James O’Brien (La chambre perdue), Oscar Wilde et son si précieux Prince heureux ou le grandissime Poe et Le Masque de la mort rouge. Parmi les modernes, le lecteur sera content de retrouver Lovecraft (Je suis d’ailleurs), Bradbury (Le vent) ou l’atroce Né de l’homme et de la femme de Richard Matheson.

Je garderai pour la fine bouche Le Meneur de loups de Claude Seignolle, saisissante peinture rurale, et Les Filles de la nuit de Jean-Louis Bousquet, magnifique poème lyrique. Une très belle introduction à la littérature fantastique classique donc, à conseiller impérativement à tout débutant, mais aussi à tous ceux qui veulent retremper leur amour aux origines. Un grand moment pour un tout petit prix.

Les Dimensions fantastiques, de Maupassant à Lovecraft, anthologie présentée par Barbara Sadoul, couv. Adrien Aymard, Librio 2010, 350 p., 7 €