Mortes-eaux (Les)

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Né en 1975 en Grande-Bretagne, Andrew Michael Hurley vit actuellement dans le Lancashire. Professeur de littérature anglaise, son premier roman Les mortes-eaux (The Loney) a été publié à 300 exemplaires par une petite maison d’édition avant d’être repéré et salué comme étant un « chef d’œuvre gothique ». Il a remporté le prestigieux prix Costa Award et sera prochainement adapté au cinéma par Danny Boyle.

 

Angleterre, années 1970. Les Smith partent en pèlerinage avec quelques membres de leur paroisse. Ils se retrouvent dans une vieille bâtisse en bord de mer, sous la houlette de leur nouveau prêtre au passé trouble, le père Wilfred. La famille, très pieuse, espère obtenir la guérison de leur aîné, Andrew, déficient mental. Ils font la connaissance des villageois, de sinistres autochtones, qui ne cachent pas leur hostilité à l’égard des pèlerins et semblent se livrer à d’obscures activités nocturnes, sortes de rites païens censés guérir les malades.

 

Quel étrange roman et quels étranges sentiments en le refermant... J’étais d’abord animée de colère et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord la quatrième de couverture nous induit en erreur puisque ce pèlerinage auquel nous assistons ne se fait pas en compagnie de père Wilfred, qui est décédé, mais en celle de père Bernard. Cela n’a l’air de rien mais vu la confusion autour des personnages entretenue par l’utilisation de surnoms en alternance avec les vrais patronymes sans qu’au départ nous en soyons avertis, plus les constants flash-backs entre les passages avec le père Wilfred et ceux avec le père Bernard, il y a de quoi en perdre son latin. D’ailleurs ce roman est tellement confus que même cette quatrième de couverture en perd son latin... Ensuite la classification dans le genre thriller a fait que pendant tout le roman je m’attendais à ressentir de l’angoisse voire de la peur... et cela a conditionné ma lecture et a desservi le roman.

Heureusement que j’ai su aller au delà. Ce roman n’est certainement pas un thriller. Un roman noir possible, un drame moderne, c’est sûr. Nous sommes en présence d’une brochette de chrétiens complètement englués dans leur croyance, tellement sclérosés dans leur aveuglement qu’ils en sont pathétiques voire détestables. Il s’est passé quelque chose avec le père Wilfred, on le sent, on le sait mais difficile d’appréhender quoi. Le père Bernard n’est pas à la hauteur, on le sent, on le sait mais difficile de savoir pourquoi. Ce pauvre Andrew, enfant handicapé, on aimerait qu’il guérisse. On sent que c’est possible, on le sait mais comment ? Alors ma colère alimentée par le fait qu’il ne se passe strictement rien de notable jusqu’à la page 175 (et là encore ce qui survient est très discret) fit subitement place à plusieurs autres sentiments. Ce roman m’a apprivoisée petit à petit et quand le deuil d’un récit terrifiant a été consommé, le plaisir s’est installé, tranquillement, lentement, sans prévenir comme l’auteur de ce roman le veut en réalité.

Les longues et nombreuses descriptions sont un pur régal. Parfaitement maîtrisées, elles nous embarquent dans une Angleterre d’un autre âge avec des parfums de Jane Eyre ou de Rebecca qui m’ont vraiment enchantée. On se retrouve plongés dans une Angleterre des années 70 très rurale, et la croyance en Dieu se retrouve rapidement confrontée à des croyances en des dieux immémoriaux. Lesquels seront-ils aptes à répondre à nos questions, aux attentes de chacun ? Je vous en laisse la primeur. Sont abordés les thèmes de la foi, de ses délires quand la croyance est mal comprise, de l’espoir, de la perte de foi, de la déception qui amène à la colère, au refus d’accepter une autre vérité...

Ce roman est finalement palpitant pour qui se laisse apprivoiser et j’avoue avoir fini par baisser ma garde pour mon plus grand plaisir. 

 

Les mortes-eaux par Andrew Michael Hurley, traduit par Santiago Artozqui, illustré par Jill Battaglia/Arcangel, J’ai Lu

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