Mictlán

Quelque part dans un décor désertique, qui rappelle le Mexique. Un semi-remorque qui roule sans jamais s’arrêter, ou à peine pour faire le plein. À son bord, deux hommes, nommés par leur sobriquet, Vieux et Gros, au passé aussi violent qu’obscur. Ils se relaient, conduisant 24 heures sur 24. Leur mission est claire : ils ne doivent jamais quitter le camion, éviter les villes, fuir les gens et surtout la police. Sinon c’est la mort. Leur chargement ? Cent cinquante-sept corps enveloppés dans des sacs plastiques, non identifiés. La loi interdit d’enterrer les victimes de mort violente. Et le Gouverneur, qui chercher à se faire réélire, veut à tout prix faire disparaître cette tache à son mandat, au moins jusqu’à son élection.

Inspiré d’un fait divers réel survenu au Mexique en 2018, Mictlán de Sébastien Rutés est un très court roman, 156 pages en poche, mais totalement barré. Un premier gros « chapitre » de 55 pages, le tiers du récit, alternant les états d’âmes de Vieux et de Gros, en trois paragraphes, et seulement trois points finaux de ponctuation. Un parti pris rédactionnel de phrases interminables et de répétitions de mots, d’expression, histoire d’asseoir définitivement le lecteur dans le bain. Un voyage d’une monotonie hallucinatoire, comme pour mieux faire comprendre ce que peuvent ressentir les deux conducteurs de ce corbillard frigorifique, dont on se doute pertinemment qu’ils n’ont aucune chance de pouvoir s’en sortir. En quelques courts chapitres violents d’ailleurs, c’est plié.

Mictlán n’est pas un roman facile d’accès, et court ne signifie pas moins intense. Une expérience littéraire originale, assez déboussolante, qui pourra cependant en rebuter certains plus habitués à quelque chose de plus linéaire.

Je remercie les éditions Folio pour leur confiance.

Sébastien Rutés - Mictlán - Editions Folio - Mars 2021