Que serais-je sans toi ?

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Guillaume Musso fait partie de ces auteurs dont j’attends la livraison annuelle avec une certaine fébrilité. Avec Harlan Coben, Maxime Chattam et Robert Crais, il forme le quatuor de mes incontournables annuels. Et tous les quatre possèdent, alors qu’ils naviguent dans des eaux littéraires bien différentes, un point commun : une capacité extraordinaire à digérer les influences de notre époque afin d’en habiller le squelette de leurs histoires respectives... Au point de réussir un tour de force : entretenir auprès des lecteurs une telle complicité que chacun, avec son livre serré entre les mains, se convainc peu à peu qu’il est l’interlocuteur privilégié de ces conteurs hors norme. Car les ancêtres livresques de Guillaume Musso ne sont pas des orfèvres de la grammaire, des acrobates du mots ou des ciseleurs de formules renversantes. Non. L’ancêtre de l’auteur de « Que Serais-je sans toi ? » était assis au coin de l’âtre, était reçu comme un ami dans les villages qu’il traversait et racontait des histoires. Passionnantes, passionnées, pleine de gens amoureux, de périls, de sombres seigneurs, de voleurs au grands cœurs et de duel à l’épée.

Autrefois, ces conteurs nourrissaient leurs œuvres des légendes anciennes, des traditions orales et des trop rares histoires jetées sur des parchemins déchirés. Aujourd’hui, la matière est tout autre. Cinéma, télévision, musique, internet, jeux vidéos... Le creuset culturel et populaire est un véritable vivier dans lequel les auteurs puisent, marchant pour les plus talentueux, sur le fil entre le clin d’oeil et la parodie, la référence et le pillage pur et simple.

« Que serais-je sans toi ? » ne fait pas exception à la règle. Dès les premières pages, alors que deux amoureux, Martin et Gabrielle, se retrouvent sous la pluie battante, les images de Hugh Grant et Andie McDowell enlacés à la fin de « Quatre Mariages et Un Enterrement » sautent aux yeux du lecteur... Mais là où tout finit dans l’excellent film de Mike Newell, tout commence pour les deux électrons libres de Guillaume Musso. Des électrons qui sont projetés sur les deux rives de l’Atlantique et qui ne se retrouveront que bien plus tard... dans des circonstances que la quatrième de couverture du roman divulgue de façon un rien trop légère à mon goût ! Martin est devenu policier et est lancé sur les traces d’Archibald, Arsène Lupin des temps modernes au profil calqué sur celui de Sean Connery (un savant mélange de ces personnages dans The Rock et Haute Voltige, ah... ces références... un délice pour connaisseur !). Le hasard voudra que le monte-en-l’air n’est autre que le père de Gabrielle, cette moitié fusionnelle avec laquelle Martin a vécu une semaine d’amour fou à l’ombre du Golden Gate Bridge. Le hasard ? Mais ce satané hasard a-t-il vraiment quelque chose à faire dans l’univers de Guilluame Musso ? Grand horloger, tisseur de sentiments, empêcheur de décliner les clichés en rond, l’auteur ne cesse de nous endormir avec des situations que l’on croit classiques... pour ensuite nous surprendre au détour d’une phrase, d’un saut temporel ou d’une irruption de... mais chut ! Je risque d’aller trop loin. Emporté, une fois de plus devrait-on dire, dans cet univers où cohérence rime avec référence, suspense avec romance et amour avec toujours, on lui pardonnera même un développement un peu facile qui frappe un personnage à mi-parcours, déclinaison romanesque et plus... morbide du « ça alors la Princesse est aussi la soeur du héros » balancé par George Lucas dans une certaine trilogie des étoiles. Que ceux qui n’auraient pas capté la référence à la fin de la lecture du nouveau roman de Guillaume n’hésite pas à m’écrire, je le leur expliquerai !

Ainsi donc, pour sa livraison annuelle, Guillaume Musso parvient encore à marquer un panier à trois points... et à renouveler sa formule avec brio.

Guillaume Musso, Que serais-je sans toi ?, Editions XO

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