Louve de Mausecret (La)

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Bourges, 1633. Deux commerçants prospères se suicident coup sur coup. Intrigué par les circonstances étranges de leur mort, le lieutenant de police Archambault mène l’enquête. En butte à la suspicion des habitants, pressé par le maire et contesté par plusieurs membres du Conseil, parviendra-t-il à prendre de court l’adversaire dont le visage se dessine peu à peu ? Ce dernier a-t-il d’ailleurs forme humaine ou est-il plutôt l’une des créatures de la meneuse de loups, dont l’empire s’étend sur les marais, à l’écart de la Ville ? Vieillissant, en proie à d’incessantes angoisses, Archambault trouvera-t-il en lui-même la force d’accomplir sa mission, ou devra-t-il se résoudre à invoquer des puissances qui à la fois le fascinent et le terrorisent ? D’ailleurs, sait-on jamais si ces puissances sont en dehors de nous ou bien en nous ? 

Thierry Berlanda est un auteur que je suis de très près depuis que j’ai fait sa connaissance lors du salon Noir Vézère du Bugue de 2019 car, au-delà de l’homme fort sympathique, éminemment cultivé et de surcroît très abordable, j’ai découvert une plume fine, érudite et sensible. Après L'orme aux loups, un policier historique, et Déviation Nord, un thriller que j’ai lu plus récemment, La louve de Mausecret  est le troisième roman que je découvre de cet auteur, qui en compte aujourd’hui plus de dix à son actif.

La dédicace à elle seule – « Aux femmes qui m’ont appris » – est un hommage à la gent féminine et donne le la à cette œuvre qui dénonce, entre autres, la trop commodément nommée « chasse aux sorcières », qui fut avant tout une chasse aux femmes.

Nous sommes à Bourges en 1633, époque où l’obscurantisme fait toujours rage. Après les ravages de la peste et ceux des guerres de religion, les croyances moyenâgeuses perdurent, perpétuées au dessein de maintenir les femmes sous le joug des hommes et le peuple dans la peur et l’obéissance aveugle. L’échevin Archambault des Mousseaux se retrouve confronté à une série de meurtres qu’il doit élucider à la demande de Claude Biet, maire de la ville, mais il se heurte aux bourgeois influents du conseil. Ces derniers ont tôt fait d’accuser Jeanne, la « sorcière » des marais qui a échappé de justesse au bûcher et semble commander à une meute de loups. L’amalgame est toujours vite fait entre les meurtriers, les sorcières et les protestants « suppôts de Satan ». L’amalgame, ou bien l’opportunité d’un bouc émissaire. C’est avec l’aide de ladite Jeanne, et en remontant aux sources, que le lieutenant de police pourra démêler cette étrange affaire et mettre en lumière ses sombres ramifications.

L’intrigue est telle que je les aime, avec des rappels historiques, des secrets inavouables, des histoires de vengeance et des personnages habilement brossés. Thierry Berlanda trame une aventure palpitante sur fond de guerres de religion et nous fait découvrir, au travers de son roman, un pan de notre Histoire. Quant au style, il est de celui qu’on déguste. L’auteur manie à la perfection une langue désuète, proche de l’ancien français, dont la beauté des mots perdus et des expressions surannées en ravira plus d’un. À ne pas mettre entre toutes les mains cependant, car bon nombre pourront être rebutés par la difficulté de compréhension que cela peut induire. En effet, bien que la majorité des mots vieillots soient traduits en bas de page, il en persiste quantité qui demanderont des recherches, (j’ai, pour ma part, découvert le sens des termes oupille, résipiscence et stipendier). Inutile donc d’imaginer faire une lecture rapide de La louve de Mausecret ou bien de vouloir le dévorer à l’instar d’un page-turner. Il faut au contraire être concentré, ouvert à la curiosité intellectuelle et surtout se laisser aller à écouter la musique des mots. Que ce soit la formulation du bien-parler des notables ou l’argot et le patois extrêmement imagés et si hauts en couleur des gens de plus basse extraction. Un régal donc pour la littéraire éprise d’Histoire que je suis et que je recommande à tous ceux qui auront les mêmes attentes.

Je remercie chaleureusement les Éditions Christine Bonneton de m’avoir permis de découvrir ce roman.

Parue sur Beltane (lit en) secret

 

La louve de Mausecret, Thierry Berlanda, Éditions Christine Bonneton, 14.90€

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