Labyrinthe de Pan (Le)

Réalisateur: 

Ofelia au Pays des Monstres

La bête humaine


L’action se déroule en 1944 en Espagne, où la Guerre Civile est finie depuis maintenant 5 ans. Après s’être récemment remariée au capitaine Vidal, (un militaire autoritaire, brutal et misogyne qui officie dans l’armée franquiste et dont elle attend un enfant), Carmen s’installe avec Ofelia, sa fille née d’un premier mariage, chez son nouvel époux. Ayant bien du mal à s’adapter à cette nouvelle vie, Ofelia s’immerge dans la lecture de contes de fée dont elle est férue, histoire d’échapper au monde cruel qui l’entoure. En se promenant dans la grande forêt qui cerne la demeure familiale, elle découvre un mystérieux labyrinthe. Pan, le gardien des lieux qui est un faune plein de grâce, de charme et de menace voilée, va lui révéler qu’elle n’est autre que la Princesse disparue d’un royaume enchanté. Alors que la santé de sa mère, épuisée par sa grossesse, se dégrade rapidement et que son beau-père se révèle être de plus en plus tyrannique, Ofelia est sommée par Pan de se soumettre à trois dangereuses épreuves initiatiques, qui devront assurer son retour sur le trône pour l’éternité, mais que rien ne l’a préparée à affronter.

Au cœur des ténèbres


Dans son 6ème film, Del Toro nous raconte l’histoire poignante d’une fillette qui tente d’échapper à la dure réalité de la répression sanglante de l’Espagne franquiste en se réfugiant dans un monde fantastique issu de son imagination. Dans la vie de tous les jours, Ofelia et sa mère subissent l’autorité du capitaine Vidal, qui s’avère être le véritable “Monstre” de l’histoire et est malheureusement bien plus réel que les horribles créatures fantastiques qui habitent le labyrinthe. Avec ce film, Del Toro revient sur des thèmes qui lui sont chers et qu’il avait déjà précédemment abordés dans certains de ses autres films (comme dans L’Echine Du Diable ou encore Hellboy). Il traite ici du fascisme et de son essence même qu’il perçoit, selon ses dires, comme étant une représentation de l’horreur ultime et une forme de perversion de l’innocence.

Le Labyrinthe de Pan est un drame ancré dans un contexte de guerre où viennent se greffer de nombreux éléments fantastiques à connotation mythologique. Tout au long de l’intrigue, la jeune héroïne fait d’incessants allers-retours entre l’univers fantasmagorique terrifiant du labyrinthe et celui, tout aussi cruel (voire même plus), d’une réalité où barbarie et torture sont malheureusement devenues monnaie courante et sont montrées ici de façon hyperréaliste. C’est ainsi que Del Toro ne nous épargne rien des terribles exactions commises, de sang froid et sans aucun état d’âme, par le cruel et sadique capitaine Vidal, prêt à tout pour éradiquer, une bonne fois pour toutes, les quelques rares résistants qui osent encore défier le régime fasciste dont il est l’un des plus farouches exécutants.


Ofelia est un étrange mélange entre une Dorothy (sortie du Magicien d’Oz) que l’ouragan du fascisme aurait envoyé au cœur d’un labyrinthe tortueux, peuplé de créatures envoûtantes et enjôleuses lui promettant monts et merveilles pour mieux pervertir son innocence, et une Alice dont le Pays des Merveilles aurait été revisité par Goya (plus précisément celui de sa série de peintures noires).

Ce film sombre, complexe et métaphorique est incontestablement l’œuvre la plus personnelle et la plus aboutie de Del Toro. A l’instar de Tim Burton, il transporte le spectateur dans un univers spécifique à nul autre pareil, rempli de poésie et de symbolisme, tout en préservant l’harmonie entre les scènes se déroulant dans les deux mondes : le monde réel est montré avec des couleurs froides (bleu, gris, vert) tandis que le monde imaginaire, qui est hybride bien qu’homogène, est décrit avec des teintes chaudes (jaune, rouge). Avec ce film unique et inclassable dont les images sont de toute beauté, Del Toro réussit là où Terry Gilliam avait échoué avec son récent Tideland. On saluera l’époustouflante interprétation de Sergi Lopez dans le rôle de capitaine Vidal ainsi que l’excellente prestation du reste du casting.

Article sur les effets spéciaux ici

Le Labyrinthe De Pan

Réalisation : Guillermo Del Toro

Avec : Sergi Lopez, Maribel Verdù, Ivana Baguero, Doug Jones, Ariadna Gil, Alex Angulo

Sortie le 1er novembre

Durée : 1 h 52

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