Faille (La)

Réalisateur: 

Le crime (presque) parfait



Calculs meurtriers

Lorsque Ted Crawford découvre que sa jeune épouse le trompe, il décide de la tuer mais en mettant au point ce qu’il pense être le crime parfait. Alors que sa femme rentre à leur domicile après avoir passé l’après-midi avec son amant, il lui tire froidement une balle dans la tête puis attend sagement qu’on vienne l’arrêter. Lorsque la police arrive sur les lieux du drame peu de temps après, l’inspecteur Rob Nunally a le choc de sa vie en découvrant que, non seulement, la victime n’est pas morte mais qu’en plus cette dernière n’est autre que la femme avec qui il avait justement une liaison. A la surprise générale, Crawford, qui a spontanément avoué son crime lors de son arrestation, décide de se passer d’avocat et de se défendre lui-même au cours de son procès. Willy Beachum, un ambitieux procureur adjoint qui est en train d’intégrer un prestigieux cabinet privé d’avocats, se voit alors confier avant son départ cette dernière affaire, qui semble bien être gagnée d’avance. Mais dans la partie qui s’annonce, rien n’est aussi évident qu’il n’y paraît.



Le maître du jeu

Au fil des ans, le mariage de Jennifer Crawford s’est avéré malheureusement être un échec. Son mari est homme extrêmement brillant mais qui est incapable d’exprimer la moindre émotion. Il l’isole, peu à peu, du reste du monde et la rabaisse constamment. Elle voit donc dans sa liaison secrète avec Nunally un moyen de vivre autre chose et d’être enfin appréciée à sa juste valeur. Elle cherche un moyen de s’échapper de sa “prison dorée” et de reprendre sa vie en main.

De son côté, Ted Crawford est un ingénieur aéronautique renommé qui est spécialisé dans l’étude des facteurs d’usure provocant des dysfonctionnements et l’analyse des crashs d’avions. Passionné par son métier dans lequel il excelle, il est particulièrement fier d’arriver à systématiquement détecter toutes les failles d’un système mécanique ou humain. Sous ses dehors de charmeur, c’est un redoutable manipulateur qui ne perd jamais son sang-froid et sa virtuosité en la matière le pousse à aller toujours plus loin. C’est un homme très intelligent qui se croit au-dessus des lois et estime qu’il n’a de comptes à rendre à personne mais, au final, c’est son arrogance qui le perdra. Il a été profondément blessé par la trahison de sa femme mais il prend sur lui pour ne pas le laisser transparaître aux yeux des autres.

Quant à Beachum, c’est un jeune avocat ambitieux qui va prendre le risque de jouer tout l’avenir de sa prometteuse carrière sur cette affaire. Il est tiraillé entre ses deux patrons : l’ancien, qui a été son mentor dans la profession et aimerait qu’il reste travailler au bureau du procureur dans l’intérêt de la justice, et le nouveau, qui lui met la pression dès son arrivée dans le cabinet privé d’avocats où seul l’argent compte. Pris entre les deux feux et obnubilé par son ambition dévorante, Beachum ne voit rien venir du piège machiavélique que lui a tendu Crawford.

Dans cette partie d’échecs, savamment programmée par Crawford, Beachum n’est qu’un simple pion qui se fait manipuler comme un novice. Lorsqu’il en prend finalement conscience, il se sent vexé d’être tombé aussi facilement dans le piège et il va alors patiemment attendre son heure pour lui renvoyer la monnaie de sa pièce, au moment où ce dernier, persuadé d’avoir gagné la partie, s’y attend le moins car, si Crawford fait preuve en toute circonstance d’un extraordinaire sang-froid dans tout ce qu’il entreprend, c’est là aussi malheureusement son point faible.

Un crime dans la tête



La Faille est incontestablement un thriller inhabituel dans la mesure où on sait ici, dès le début, qui est le meurtrier. En outre, ce dernier se laisse arrêter sans poser le moindre problème juste après avoir commis son meurtre tout en avouant aussi spontanément en être l’auteur. L’intrigue se concentre dès lors sur l’affrontement des deux principaux protagonistes qui sont entourés par de nombreux personnages secondaires apportant, chacun, un éclairage différent sur l’affaire. On assiste alors à la confrontation des deux hommes qui ont chacun besoin de la défaite de l’autre pour servir leur plan. Entre manipulations et faux-semblants, ambition dévorante et orgueil mal placé, l’affrontement va les mener bien au-delà de ce que chacun avait initialement prévu. Alors que Beacham était persuadé pouvoir régler ce dossier dans les plus brefs délais, il va rapidement se retrouver dans une impasse devant le manque de preuves concrètes qui pourraient incriminer l’assassin (l’arme du crime reste introuvable malgré plusieurs perquisitions faites au domicile du prévenu et la victime, qui est toujours en vie mais plongée dans un coma irréversible, est dans l’incapacité de témoigner contre son époux). Le mari roublard mène la partie en profitant à merveille de toutes les failles du système juridique américain mais, alors qu’il s’était cru définitivement sorti d’affaire, il finit par se retrouver victime de son propre jeu. L’intrigue repose entièrement sur le comportement et la psychologie des deux principaux protagonistes qui passent leur temps à se manipuler l’un l’autre et à contrecarrer les plans de leur adversaire.

Le scénario intelligent et sophistiqué, qui balade le spectateur de rebondissements en révélations, est construit comme une partie d’échecs, grandeur nature, où chacun des deux “joueurs” agit de façon à toujours avoir un ou plusieurs coups d’avance sur son adversaire. Le film repose entièrement sur l’interprétation de l’ensemble du casting et, plus particulièrement, sur le duo/duel Hopkins – Gosling. Toutefois ce thriller diabolique comporte, lui aussi, ses propres failles : à savoir l’interprétation (certes impeccable) d’Hopkins, malheureusement bien trop “copiée/collée” sur son personnage d’Hannibal Lecter (le côté cannibale en moins) et le postulat de départ qui nous est présenté sur les caractéristiques de la liaison entre la victime et son amant (si le spectateur ne les accepte pas pour argent comptant, le scénario ne peut alors plus fonctionner).

La Faille

Réalisation : Gregory Hoblit

Avec : Anthony Hopkins, Ryan Gosling, David Strathairn, Rosamund Pike, Embeth Davidtz, Billy Burke, Cliff Curtis, Fiona Shaw, Bob Gunton.

Sortie le 9 mai

Durée : 1 h 51

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