L'Imaginaire en fête à l'Académie Royale
Ce samedi 16 mars, l’Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique tenait sa traditionnelle séance de remise des Prix littéraires dans le somptueux Palais des Académies à Bruxelles, situé à côté du Palais Royal.
Parmi les quelque quatorze lauréats, figuraient trois figures importantes de l’Imaginaire belge : Alain Dartevelle, Jacques Finné et Bernard Quiriny. Honoré le premier, pour son recueil de nouvelles Amours sanglantes, paru aux Editions L’Âge d’Homme (collection Petite Belgique dirigée par Jean-Baptiste Baronian), voilà Dartevelle et ses huit nouvelles : « Oscillant sans cesse entre fantastique et science-fiction, Dartevelle distille insidieusement sa petite musique inquiétante », écrivions-nous. Il est bon que cet écrivain discret soit officiellement reconnu, après tant de romans et de nouvelles remarquables, mais sans doute trop peu diffusés hors du sérail. Ciselés à l’extrême, ses textes sont à savourer lentement, à déguster même. Après Narconews (Editions Murmure des Soirs) - autre recueil déjà commenté -, un nouveau florilège de son talent nous attend, intitulé Dans la ville infinie, dont je vous entretiendrai bientôt.
Second talent honoré : Jacques Finné. Nous connaissons bien cet auteur, un des meilleurs essayistes francophones, dont le Panorama de la littérature fantastique américaine (Editions du Cefal) fait autorité. L’ouvrage couronné est un monument : Des Mystifications littéraires, pavé de quelques 517 pages, paru aux Editions José Corti en 2010. L’Académie, par la voix de son secrétaire perpétuel Jacques de Decker, a souligné son caractère extraordinairement original. Issu d’une conversation d’il y a quarante ans avec Jean-Baptiste Baronian, l’ouvrage balaie des siècles de littérature, en en essuyant les débris illustres, des écrits apocryphes aux plagiats affirmés. L’essai est incontournable pour tout amateur de fantaisie historique décalée. De Potocki à Polidori, de Rimbaud à Cendrars, d’Ossian à ce cher… Adoré Floupette, d’Omar Khayyam à Marco Polo, vous saurez tout sur ces auteurs mythiques. La dernière partie, consacrée à H. P. Lovecraft et son immonde descendance, est particulièrement saisissante et réussie. Une somme magistrale.
Dernier auteur belge illuminé par le faisceau académique : Bernard Quiriny. L’auteur des brillants Contes carnivores et des curieux Les Assoiffés se voit ici récompensé pour un nouveau recueil de contes paru au Seuil, Une collection très particulière, dont nous vous rendrons compte prochainement. Quiriny est un auteur bizarre, tenant autant de Jean Ray que de Jacques Sternberg et certainement, avec Thomas Gunzig, l’un des jeunes écrivains belges passés du stade prometteur au stade accompli. Il y a du Voltaire aussi en lui, par une grande brillance de style et un regard persifleur revigorant.
Merci donc à la fort sérieuse Académie Royale d’avoir distingué ces trois écrivains qui honorent la réputation bien établie de la littérature belge dans le domaine fantastique. Un peu d’honneurs ne lui fera que du bien.