Retour sur l'horizon

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Un concours de circonstances a fait que cette anthologie de science-fiction française s’est retrouvée deux fois dans mes mains. Je pensais lire ce livre, question de ne pas mourir idiot. Plusieurs personnes, connaissant mes gouts personnels, m’avaient dit que ce n’était pas une anthologie qui correspondait à mes gouts. Et je pense qu’ils ont raison. Je continue à préférer la science-fiction anglo-saxonne.

La préface de Serge Lehman m’a ennuyée et je ne l’ai pas achevée. Par contre j’ai aimé sa longue interview sur Youtube.

Ce qui reste du réelFabrice Colin. Voilà une lettre qui a toutes les caractéristiques de la nouvelle cachée, qui parle de la firme américaine Hanson et de l’hypothèse de construire un androïde Philip K. Dick. Cet engouement pour Dick n’existe pas hors de l’Hexagone. Quand on parle d’auteurs de science-fiction classiques, on pense à Heinlein, Asimov, Herbert, Vance, mais pas nécessairement à Dick. J’ai donc lu ce texte sans conviction.

Effondrement partiel d’un univers en deux joursEmmanuel Werner. Encore une nouvelle sur l’androïde de Dick. Idem que pour la nouvelle précédente. Autant lire du vrai Dick.

Tertiaire - Eric Holstein. Dans un style percutant, on découvre un Paris dans un futur proche, régit par la finance et les requins de toutes sortes. Tout se vend et tout s’achète. Une nouvelle qui pourrait très bien se produire. Ca mériterait une histoire plus complète.

Une fatwa de mousse de tramway - Catherine Dufour. Encore un texte qui se situe dans un futur proche et qui nous parle de vente d’éléments de centrale nucléaire. Un texte principalement basé sur les dialogues assez caustiques. C’est ma première approche de Catherine Dufour et ça ne m’a pas convaincu.

Les fleurs de TroieJean-Claude Dunyach. Voilà une nouvelle qui remonte le niveau de ce qui précède. Curieusement en la lisant, j’ai pensé à « Ubik » de Dick, sans doute parce que Dunyach nous présente un couple de prospecteurs miniers qui exploitent des astéroïdes du côté de Jupiter, qui utilisent des implants neuraux, et dont la femme veut se réfugier dans un monde virtuel. C’est en même temps un space opera. Pas mal parce que là, je retrouve un genre que j’apprécie.

PirateMaheva Stephan-Bugni. Nouvelle nous présentant une société basée sur la bureaucratie, dans laquelle on suit un personnage qui reçoit des colis qu’il n’a pas demandés. J’avoue ne pas avoir accroché à cette nouvelle. Mais où est la science-fiction dans cette histoire de poste ?

Trois singesLaurent Kloetzer. Nouvelle écrite à la première personne. Un agent travaillant pour une organisation doit faire sauter une bombe. Il s’agit d’un techno-thriller. Le personnage fait trop penser à ceux qu’on trouve dans les films de série B, sans peur, qui exécute les ordres sans état d’âme. De plus, le langage châtié n’est pas ce que je préfère. A choisir, un bon Tom Clancy est préférable.

Lumière noireThomas Day. Longue nouvelle, vrai road movie qui commence au Canada pour se terminer aux USA. « Lumière noire » c’est la singularité, c’est l’IA qui a prit le contrôle sur terre et qui veut explorer le système solaire et au-delà. De facture classique, cette nouvelle est excellente.

Temps mort - André Ruellan. La mort, la douleur, le cancer vécu par un patient sur son lit d’hôpital. Pas vraiment folichon. Très dur, et pas science-fiction du tout.

Les trois livres qu’Absalon Nathan n’écrira jamaisLéo Henry. Une excellente nouvelle d’un auteur qui nous parle de création littéraire à travers trois histoires différentes. Le tout regroupé dans cette nouvelle. Sans aucun doute une petite perle dans cette anthologie.

Penchés sur le berceau des géantsDaylon. L’histoire se passe dans un avenir proche, sur une Terre où les extraterrestres ont fait leur apparition. Une bonne partie se passe dans le Tub, moyen de transport. On dirait que cette nouvelle a été écrite pour des navetteurs.

DragonmarxPhilippe Curval. Une nouvelle qui se passe dans une Europe de l’Est où règne le socialisme magique. Elle intéressera probablement les nostalgiques du communisme. Je n’ai pas du tout aimé.

Terre de fraye - Jérôme Noirez. La rencontre d’un surfeur avec une extraterrestre donne cette longue nouvelle. Sea, sex and sun. C’est bien écrit, un peu long, et la fin méritait quelque chose de plus intense.

Je vous prends tous un par unDavid Calvo. Est-ce de la science-fiction ou les délires d’un auteur qui fait référence à des comics ?

Hilbert HôtelXavier Mauméjean. Un hôtel infini, labyrinthique dans lequel le personnage principal prend son poste. Mauméjean fait ici un clin d’œil à la bibliothèque de Borges. Intéressant.

Entre Retour sur l’horizon et Space opera sorti il y a quelques temps déjà chez Bragelonne, je préfère de loin cette dernière. Le « sense of wonder » n’est pas présent et le futur reste toujours trop proche et trop sombre. A croire que les auteurs de cette anthologie vivent sous un Spin qui les empêche de voir des futurs flamboyants et passionnants. Cette anthologie aurait dû s’appeler « Horizon désenchanté ». De plus, tous les textes ne sont pas du même niveau. On se demande parfois où est la science-fiction dans certains d’entre eux. Le défaut majeur de cette anthologie c’est que les différents auteurs ont retenu le mot « fiction » et ont oublié le mot « science ».

J’ai lu l’anthologie avec une sensibilité belge. J’avoue que j’ai parfois eu l’impression d’être passé à côté. Mais on m’avait prévenu ! Et je ne dois m’en prendre qu’à moi-même. Néanmoins j’ai bien aimé les nouvelles de Jean-Claude Dunyach, Thomas Day, Léo Henry et Jérôme Noirez.

Cette anthologie est un mélange entre anciens et nouveaux auteurs et représente un panel de la science-fiction actuelle dans l’Hexagone.

Retour sur l’horizon, Serge Lehman, Denoël Lunes d’encre, 575 pages, 2009

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