John Rambo

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La grande machine à recycler qui alimente la production hollywoodienne depuis les premiers balbutiements du cinématographe ne pouvait pas manquer de régurgiter, sous une forme ou une autre, les icônes de l’actionner eighties. Après Rocky Balboa, revenu d’entre les cordes, un John McClane sournoisement émasculé, mais drôle et avant un Indiana Jones qui semble être le seul à vouloir jouer à fond la carte de l’inévitable vieillissement, John Rambo nous revient dans une courte aventure aux allures de pamphlet paradoxal.


Commencé comme un survival, au cœur duquel un ancien militaire se voyait rejeté par la société qui l’avait envoyé au casse-pipe, la série, inspirée d’un roman de David Morell, était rapidement devenue le porte drapeau d’une idéologie revancharde, alimentée par les fondements manichéens et ultra-libéraux de l’ère Reagan. Sa réapparition, dans un contexte proche mais pas identique, allait-elle sonner le retour d’un Stallone hypertrophié, enfermé dans l’archétype du héros indestructible, seul capable de venger l’honneur d’un drapeau incendié ?

Là, la réponse est non. Plantant son décor dans un coin de la planète où les Américains n’ont pas grand intérêt à traîner leurs bottes de gendarmes du monde, à la frontière entre la Thaïlande et la Birmanie, Stallone cherche avant tout à schématiser un état de guerre. Dans son expression la plus abjecte, la plus cruelle, la plus animale et la plus excessive. Dans cette « mise en situation » éprouvante, rien ne nous sera épargné : torture, exécution arbitraire, viol, massacre d’enfants et de femmes… Le tout avec un choix de mises en scène ultra réaliste qui secouera les plus aguerris.

Dans cet environnement John Rambo s’impose clairement comme « celui qui sait ». Soldat lui-même, rongé par la violence de ses exactions passées, il n’est plus, comme dans les opus précédents, un grain de sable, une pièce rapportée, une épine dans le pied d’un éventuel tortionnaire. D’ailleurs, dans un monologue intérieur marmonné sur fond de forge infernale, Stallone glisse dans la bouche de son personnage ce qui s’apparente à une confession. Il ne s’est jamais vraiment battu pour son pays, il s’est battu parce qu’il aime ça, parce que cette violence, cet esprit de lutte fait partie de lui, coule dans ses veines. Reste alors à la machine de guerre, réconciliée avec elle-même après trois films d’errance, à puiser dans ce bouillonnement de violence pour répondre aux agresseurs par une agression plus radicale encore. Dans un déferlement cru, sanglants à l’excès, mais
cinématographiquement lisible, Stallone filme un véritable carnage où la figure de guerrier iconique demeure, par des procédés cinématographiques évidents (présence au second plan, déplacement furtif, objet servant d’interface avec l’action…) en retrait de l’action principale.

Un chaos final qui semble être le passage obligé pour Rambo avant un retour vers ses racines américaines et un plan final qui rappelle, avec justesse, les premières images de « First Blood ».

Loin d’être destiné à tous les publics, emballé dans une solide couche de violence, à appréhender avec un minimum de recul et de réflexion (je sais, pour un « Rambo », cela peut paraître surprenant…) ce « John Rambo » n’en demeure pas moins la mise à jour intéressante d’un mythe cinématographique que l’on aurait pu croire englué dans une idéologie de droite radicale.

John Rambo

Réalisation : Sylvester Stallone

Avec : Sylvester Stallone, Julie Benz, Paul Schulze

Sortie le 6 février 2008

Durée : 1h30

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