Fleur de Tonnerre

Ce « roman » est aussi un pan d’Histoire romancée. On suit les pas d’une Basse-Bretonne, Hélène Jegado, dite Fleur de Tonnerre, qui se révèle depuis ses 8 ans être une grande empoisonneuse.

Utilisatrice de belladone et d’arsenic, cette cuisinière fort compétente a tout au long de sa vie autant circulé de bourg en bourg qu’assassiné sans limite. Il faut reconnaître que dans les années 1800-1850 (elle fut exécutée en 1852), la communication dans les coins reculés, sans éducation scolaire et superstitieux était assez limitée.

S’il est vrai que le suspense n’est pas central (d’ailleurs après 5 meurtres, perso j’en avais ma dose), la force du récit, ce qui fait qu’on continue la lecture, tient à quelques artifices très bien amenés :

• La présence de cartes géographiques pour suivre les déplacements, d’une reproduction de la statue de Fleur de Tonnerre…
• La récurrence de deux Normands, perruquiers, qui ponctuent chaque chapitre avec leurs aventures dans ce pays de l’Ankou, perdus, persécutés et surtout très malchanceux. Un peu comme dans les films « L’âge de glace », ils reviennent tels Scrat et son gland et donnent un côté pittoresque voire comique à l’ensemble qui est plutôt glaçant par son sujet
• La brièveté des chapitres, sauf un, qui avive le rythme. Évidemment le plus long porte sur l’arrestation, le procès et la mise à mort de la coupable.
• Et par-dessus tout, l’art de Jean Teulé pour les images par association ou détournement de sens (« […] le sarrasin – cette neige de fin d’été […] », « l’assiette navigue dans l’air », « l’haschichin en haut de l’échelle – à ne pas confondre avec l’assassin en bas du dispositif – bascule vers le blason en verre », « sa mine de belette découvrant un pigeonnier » etc.)

Malgré tout, je déplore le tout dernier chapitre, qui selon moi, n’apporte rien au récit pour la partie qui touche à Émilie.

Fleur de tonnerre par Jean Teulé, illustration de Frédéric Pioncelet, Pocket