Enfantômes (Les)

Auteur / Scénariste: 

Joëlle Wintrebert a reçu de nombreux prix, dont le Grand Prix de la Science-Fiction française pour son roman Le créateur chimérique en 1989. Les enfantômes regroupe une douzaine de ses nouvelles, certaines à tonalité plutôt fantastique, d’autres plus résolument SF. Même si les histoires racontées peuvent se dérouler dans des univers ou à des niveaux de réalité différents, chacune a son charme et reste reliée aux autres par le fil directeur, qui est celui de l’enfance — parfois maltraitée ou instrumentalisée, mais pas seulement.

Dans Les Enfantômes, un Zorro de l’informatique dévalise les crédits alloués aux forces militaires, tuant dans l’œuf toutes les velléités de guerre sur Terre. Une histoire à la fois émouvante et amusante, qui évoque le calvaire subi par les jeunes victimes des conflits.

L’œil rouge du coutelier nous emporte sur les traces d’une fillette et de son chien, galopant à travers les rues d’une ville aux accents italiens ou espagnols. Une escapade qui risque de bien mal tourner lorsqu’ils tombent sur une bande de garçons plus âgés… Fantasmagorique et charmant.

Dans Le miroir magique, un garçon malade reçoit la visite de Merlin, clown au grand cœur ou ami imaginaire, à vous de voir. Le jour de ses dix ans, celui-ci lui offre un miroir magique. Une histoire belle, sensible, triste et drôle à la fois, où la magie vient rétablir l’équilibre.

Dans Bébé tigre, un tapis magique enchante des fillettes enfermées dans un atelier de tissage sous la houlette d’un maître tyrannique. Encore une très jolie nouvelle.

Le ciboire nous emmène dans une promenade d’été pleine de mystère et de magie. Une histoire au goût d’enfance et de vacances, où il est question de chapelle abandonnée et de sortilège. Ironique, doux et enchanteur.

La folie n’est pas très loin dans La voix du sang, où un jeune adolescent raconte la vengeance qu’il a menée envers des parents, qui ne sont peut-être pas ce qu’ils paraissent.

Dans Victoire, la rencontre entre une vieille dame et une fillette ne se termine pas comme on l’aurait imaginée. Cruel, ironique et joliment amené.

Les enfants du vent nous emmène dans une cité palatine, sur un monde lointain (ce monde a évoqué chez moi, allez savoir pourquoi, certains univers de Miyazaki). La venue des Baladours est un événement que Julia ne manquerait pour rien au monde. Une histoire d’amour, de vent, de liberté. Lumineux.

Avec L’enfant du lignage, nous plongeons cette fois dans la SF. La nouvelle est l’une des plus longues du recueil, c’est aussi celle qui m’a le moins plu. La Terre a été ravagée par un virus, une partie des survivants se cloître dans des cités à l’écart du monde. L’intrigue m’a paru un peu noyée dans l’exposition des faits scientifiques et politiques qui ont amené la situation au point où elle en est.

Oasis nous fait voyager au cœur du désert. Une terrible maladie inconnue frappe les habitants d’un village. Valentin y a rejoint sa mère, qui mène des recherches dans un laboratoire de biotechnologie. Son amitié avec la jeune Khadija va-t-elle les sauver ?

La fille lune aborde aussi la question des modifications génétiques, à travers le rêve éveillé d’un adolescent en villégiature au bord de la mer. Quelle sorte de sirène voit-il apparaître sur la plage, par une nuit obscure et solitaire ? Une histoire qui revisite sous un angle original le mythe de l’Atlantide, avec une rencontre insolite et magique, aux accents de premier amour.

Le don des chimères nous fait découvrir un monde qui s’est reconstruit après une pandémie catastrophique, où les biotechnologies ont permis de façonner des créatures chimériques très demandées pour leur peau. Idunn, biologiste pour le compte d’une prestigieuse société, doit convaincre une de leurs anciennes chercheuses de revenir travailler pour eux. Surya, qui vit retranchée dans sa maison-fleur avec ses chimères, n’a aucunement l’intention de collaborer. Idunn n’a pas droit à l’échec, car elle a une fille, une petite autiste (ou souffrant d’un syndrome qui s’en approche) accueillie dans un institut spécialisé extrêmement coûteux. De son côté, Surya, malgré toutes les barrières qu’elle a érigées, se sent bien seule face aux attaques répétées de ceux qui convoitent ses chimères… Une belle histoire de rencontre, d’amitié ou peut-être même d’amour entre deux femmes.

En conclusion, j’ai découvert avec ce recueil une très jolie plume, élégante, sensible, pleine d’humour et de poésie, de piques et de tendresse.

 

Les Enfantômes par Joëlle Wintrebert, ActuSF

Type: 

Ajouter un commentaire