Affaires spéciales : le dossier Io

Dans le roman policier, la politique fiction est particulièrement casse-gueule. Souvent parce qu’on veut en faire trop, la réalité prenant le pas pas sur la fiction, au point que l’on se demande si l’on n’est pas plutôt en train de lire une fausse biographie uchronique qu’autre chose.

Tout réside donc dans le savant dosage entre le réel et l’irréel. A ce jeu de plume, notre auteur ici, Hugo Tosi, le pseudonyme d’un auteur que je connais et j’apprécie pour la qualité de ses ouvrages, s’en tire plutôt admirablement.

L’action se situe en France, sous la présidence d’un certain Jupiter autour duquel gravite un certain nombre de parasites plus attirés par les maroquins et les ors de la république que par la dignité de leur fonction. Il suffira d’ailleurs au lecteur de ne pas avoir à fournir de gros efforts pour lire entre les noms ceux qui sont visés et qui existent réellement. Dans ce contexte, Marion Barthes, capitaine de gendarmerie au sein des Affaires Spéciales, divorcée et mère d’un enfant souffrant d’un TSA, est appelée sur une enquête visant trois décès aussi spectaculaires que cruels. Le problème est que ces trois personnes étaient des proches de l’Elysée. En fouillant dans leur passé, Barthes découvre également qu’elles semblent plus ou moins liées à la disparition d’un conseiller présidentiel, « suicidé » du haut d’un pont. Un décès qui, pour les plus anciens, m’a fait un peu penser à cette disparition de Beregovoy à l’époque… Et comme tout ce qui touche à l’Etat ne regarde que l’Etat, la capitaine va vite comprendre qu’elle a mis le pied dans une sacrée fourmilière.

Le récit se découpe en courts chapitres s’étalant sur un peu moins d’un mois. Comme toujours, on appréciera le style nerveux de l’auteur, entrecoupé de moments de pures poésies lorsqu’il décrit les paysages des Alpes Maritimes, en particulier des gorges de Daluis. L’intrigue politique sonne vraie, même si l’on sent bien que l’auteur n’apprécie pas spécialement le chef d’état dont il dresse le portrait. Le final d’ailleurs est particulièrement stressant parce que très réaliste et plausible. J’aurai été moins convaincu par contre par le rôle de la jeune fille punkette sur les bords et spécialiste en drone qui va aider la police, et aussi par l’intervention d’Elias, le fils autiste, qui découvre assez facilement le nœud de l’affaire à la façon de Miko Hughes/Simon Lynch protégé par Bruce Willis/Art Jeffries dans le film Code Mercury.

Hormis ce petit détail, monsieur Hugo Tosi prouve une nouvelle fois qu’il peut tout écrire avec une facilité déconcertante et se renouveler à chaque roman au point qu’on ne l’attend jamais forcément là où il se trouve. Le signe des grands auteurs, indéniablement. Et quelque chose me dit qu’on retrouvera sans doute Marion Barthes un jour prochain….

Je remercie les éditions Hugo et bien entendu l’auteur pour la confiance dont ils m’honorent depuis quelques années déjà.

Hugo Tosi - Affaires spéciales : le dossier Io - édition Hugo Poche - avril 2023, 7,90 €