Wild Cards

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Les univers partagés, dont la plupart sont nés dans les années 80 du siècle dernier et dont certains survivent, sont une particularité de la littérature SF américaine, car je ne vois pas d’exemples dans d’autres littératures. C’est autre chose que les franchises, autre chose que les simples reprises ou partages d’idées. Et la plupart de ces univers partagés sont inconnus du public français : aucune traduction de Theives’ world, le plus ancien d’entre eux ; un seul volume traduit, les nouvelles de Megan Lindholm, pour Liavek. Un seul, le roman de Carolyn J. Cherryh, Les légions de l’enfer, pour Heroes in hell, univers créé par Janet Morris, est disponible. Je mettrai à part la gestion, entre franchise et univers partagé, de l’univers de Ténébreuse, créé par Marion Zimmer Bradley.

 

Pour cet univers-ci, il aura fallu le succès du Trône de fer pour que les éditeurs français jugent utile de le présenter comme un complément à l’œuvre de G.R.R. Martin et de le diffuser. Mais peut-être cette brèche dans l’indifférence des éditeurs français profitera-t-elle aux autres univers partagés ?

En fait, cet univers est né, apparemment, d’un jeu de rôle que Martin et ses amis avaient apprécié, Super World. Peu au courant des jeux de rôle et des BDs, j’ignore si ce jeu et les BDs qu’il a inspirées avant les textes des anthologies sont connus des amateurs français. Toujours est-il que, au moment de créer l’univers partagé, Martin et ses amis ont certainement modifié les bases même des scénarios de jeu. Ils ont repris certains personnages, ils ont ajouté certaines idées sur l’origine de cette uchronie, sur les jokers, ceux qui disposent de pouvoirs incomplets et subissent des tares diverses, etc. C’est l’écriture par Howard Waldrop de ce qui est devenu la nouvelle d’entrée du premier livre, Trente minutes sur Broadway, qui a modifié le projet et donné son aspect définitif à l’univers.

 

Nous sommes donc dans un monde où un virus artificiel d’origine extra-terrestre a été répandu le 15 septembre 1946 et a tué un grand nombre de personnes, en a transformé un certain nombre d’autres en « jokers », exclus de la société, plus ou moins infirmes, et un petit nombre en « as », possesseurs de pouvoirs quasi magiques variés. Et les différentes aventures de ces as dans un monde dont, malgré leurs pouvoirs, ils ne modifient pas vraiment l’histoire, constituent donc la trame de cette anthologie. Les nouvelles vont de 1946 à 1986 (date de parution initiale du livre) et racontent donc les tentatives d’un certain nombre d’as pour profiter de leurs pouvoirs et se faire admettre dans une société américaine dont l’évolution reste celle que nous avons connue, avec juste quelques légères variantes comme la chasse aux as par Mc Carthy...

 

Il s’agit essentiellement d’un jeu littéraire ; aucune recherche profonde du genre « et si... » n’est tentée dans ce livre : elle aurait imposé de créer une véritable uchronie dans laquelle l’histoire des USA (les nouvelles restent essentiellement centrées sur les États-Unis) aurait changé du fait de ces « super-héros », ce qui n’est pas le cas. Amusant, mais sans réelle profondeur philosophique...

 

Wild Cards, anthologie dirigée par G.R.R .Martin, traduit par Pierre-Paul Durastanti et Henry-Luc Planchat, J’a iLu, n° 11531, 2016, 762 p., couverture de Michel Komarck, 9,9€, ISBN 978-2-290-06863-2

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