GIEBEL Karine 03
Pouvez-vous nous parler de l'inspiration derrière votre dernier roman, Et chaque fois, mourir un peu ?
La genèse de ce roman, c’est l’envie de parler du stress post-traumatique, mais aussi la volonté de rendre hommage au travail formidable des humanitaires.
Pourquoi avez-vous choisi de centrer l'histoire autour de Grégory, un infirmier du CICR ?
J’aurai pu choisir une autre ONG, mais comme toujours, il fallait faire un choix et le CICR est présent depuis très longtemps sur toutes les zones de conflit.
Comment avez-vous procédé pour vous documenter sur le travail des infirmiers dans les zones de conflit ?
Le CICR possède une bibliothèque d’archives très riche, qui m’a été fort utile. Des films, des photos, des reportages audio, des interviews, dans lesquels on peut suivre le travail des humanitaires. En plus de m’appuyer sur ces archives, j’ai lu des livres sur certains conflits (comme celui qui dévaste la République Démocratique du Congo depuis des décennies), j’ai regardé des documentaires sur chacun des pays visités par mon personnage.
Le personnage de Grégory est très complexe. Comment avez-vous développé son profil psychologique ?
Comme je le fais pour tous mes personnages. Au départ, ils sont très flous, on pourrait les comparer à des silhouettes qui se rapprochent de page en page, jusqu’à devenir très nettes ! Un personnage, il faut du temps pour l’apprivoiser, le cerner, le connaître… Mais au fil des chapitres, chaque personnage prend chair.
Quels défis avez-vous rencontrés en écrivant les scènes de guerre et de conflit ?
Ce roman m’a demandé un immense travail de documentation. Il m’a fallu choisir quels conflits j’allais évoquer, il m’a fallu ensuite me documenter sur chacun d’entre eux, parfois pendant des semaines. Ensuite, la question était : comment le présenter aux lecteurs ? Il fallait rester dans un roman, dans une fiction, tout en étant réaliste et juste.
L’autre question était de savoir ce que je devais écrire et ce que je devais passer sous silence. Les investigations que j’ai menées, les témoignages que j’ai écoutés, m’ont parfois conduite au bout de l’enfer. Comment, ensuite, retranscrire ça aux lecteurs ? J’ai tenté de ne pas édulcorer l’horreur de la guerre, tout en ne tombant pas dans des descriptions trop « gores »…
Votre livre traite aussi de la vie personnelle de Grégory, ponctuée de drames familiaux. Pourquoi était-il important d'inclure cet aspect dans l'histoire ?
Étant donné que je voulais écrire sur le stress post traumatique, il fallait qu’on puisse connaître tout de la vie de mon héros. Toutes ses blessures, qu’elles soient liées à son travail d’humanitaire ou aux drames familiaux qui jalonnent sa vie.
Comment avez-vous équilibré les moments de tension intense avec les moments plus personnels et introspectifs du roman ?
C’est le genre de choses qui se fait naturellement, un rythme qui s’impose au fil des pages. Il faut des parenthèses… Il fallait des pauses entre deux conflits. Ces moments où mon personnage retrouve ses proches et qui sont censés lui permettre de tenir le choc de mission en mission.
Pouvez-vous nous parler de votre processus d'écriture ? Y a-t-il des routines ou des rituels particuliers que vous suivez ?
Non, pas de rituel d’écriture ! J’écris lorsque j’en ai envie, lorsque l’inspiration est là. Je peux écrire douze heures par jour, voire plus, mais je peux aussi ne pas écrire pendant toute une journée. J’écris en écoutant de la musique la plupart du temps, pour m’isoler du monde extérieur.
Avez-vous rencontré des personnes travaillant pour le CICR ou des témoins des conflits que vous décrivez dans le livre ?
Non, je ne les ai pas rencontrés personnellement. J’ai lu ou écouté leurs témoignages.
Comment vos propres expériences et émotions influencent-elles votre écriture ?
Je ne saurais répondre à cette question… A vrai dire, je ne sais pas ! Je pense que dans chaque roman, un auteur laisse toujours un peu de lui, mais personnellement, je n’écris jamais sur mes expériences personnelles.
Ce livre est le premier d'une série de deux tomes. Pouvez-vous nous donner un aperçu de ce que nous pouvons attendre du second volume ?
Vous serez surpris, c’est tout ce que je peux vous dire !
Comment pensez-vous que Et chaque fois, mourir un peu se compare à vos précédentes œuvres ?
J’essaie de me renouveler à chaque roman. Je n’ai pas envie de reprendre les mêmes recettes à chaque fois ! Ce livre-là est encore bien différent de ce que j’ai pu faire avant. Il demeure dans la littérature noire, mais ce n’est pas un thriller, du moins en ce qui concerne le premier tome…
Quel message espérez-vous transmettre à travers ce livre ?
Comme toujours, je traite de sujets qui m’interpellent, qui me questionnent, qui me révoltent. Ici, j’ai voulu parler de ceux dont on ne parle pas assez : les humanitaires qui risquent leur vie pour aller secourir les autres. Et au travers de leur combat, on peut voir toute l’horreur de la guerre…
Avez-vous des conseils pour les écrivains en herbe qui aspirent à écrire des thrillers ou des romans aussi intenses que les vôtres ?
Ne jamais se plier aux règles. Écrire ce que l’on a envie d’écrire et ne surtout pas essayer de suivre une mode ou de ressembler à un autre auteur…