TARVEL Brice 01

Auteur / Scénariste: 

Comment est né « Dépression » ?

C’était à une époque où les éditions Carrère prévoyaient de sortir un magazine de BD. J’avais un contrat pour scénariser une série d’aventures dessinée par Edouard Aidans. Quelques planches furent réalisées, mais jamais publiées car l’éditeur renonça au projet. Me retrouvant ainsi sans travail, désirant depuis longtemps écrire pour Fleuve Noir, je me mis à l’ouvrage. C’était la mode des premiers romans gores. J’écrivis « La Chair sous les ongles », puis « Dépression » dans la foulée. À moins que ce ne soit l’inverse. Les deux manuscrits furent envoyés par la poste et acceptés en une dizaine de jours, avec la note de 9/10 du comité de lecture pour « Dépression ». Les deux directeurs de collections d’alors, Danièle Riche et Joël Houssin, étant passés entre-temps aux éphémères éditions Patrick Siry, mes textes suivirent leur sillage, puis revinrent au Fleuve Noir quand Siry rendit les armes. Nicole Hibert, nouvelle venue au Fleuve après ces péripéties, me confia, à propos de « Dépression », qu’elle n’avait jamais lu un roman aussi désespérant dans la collection Anticipation. À tort ou à raison, je pris cela pour un compliment. En tout cas, j’étais satisfait. Cela faisait une dizaine d’années que j’essayais d’avoir le souffle pour écrire autre chose que des nouvelles et j’avais enfin réussi.

On ne peut pas dire que le monde que tu décris dans ton livre soit réjouissant. Brice Tarvel est-il pessimiste ?

Il l’est très souvent. L’expérience m’a montré qu’on avait beaucoup moins de chances de se tromper en étant pessimiste qu’en étant optimiste. À mes yeux, un pessimiste averti vaut deux optimistes pour le moins. Toutefois, je ne passe pas mon temps à broyer du noir et à déglinguer le moral des autres. Je sais faire la fête, mettre l’ambiance éventuellement, manier l’humour et, ne serait-ce que pour la jeunesse, il m’arrive d’écrire des histoires qui sont loin de tirer des larmes.


Tu es aussi auteur de BD. Quelle est la différence entre écrire un roman ou une BD ?

C’est principalement une affaire de concentration. Lorsque j’écris un scénario de BD, j’éprouve plus de facilité, je me sens plus léger. Quand il s’agit de revenir en arrière dans un roman, c’est toute une affaire, il faut relire des pages et des pages pour savoir comment est habillé tel ou tel personnage, quelles sont ses motivations, etc. En BD, c’est plus simple, plus rapide. Il convient cependant d’avoir toujours à l’esprit qu’un dessinateur va passer derrière et qu’il est nécessaire de lui offrir quelque chose d’intéressant à illustrer.

Pas de projet de réaliser « Dépression » en BD ?

Non, sauf si on m’en faisait la demande. Sait-on jamais ?

Ce roman est sorti initialement en 1990. Pourquoi l’avoir tiré des placards ? Comment l’as-tu réécrit ?

J’écrivais à la main, à l’époque, je faisais un brouillon, puis je retapais le tout sur une machine à écrire portative, avec papier pelure pour obtenir un double et tout le toutim. Personne n’attendait rien de moi, j’étais seul dans mon coin, ce qui me donnait un grand sentiment de liberté. Expédier un manuscrit, c’était pour moi comme une bouteille à la mer. Puisque le texte n’était pas numérisé — comment aurait-il pu l’être ? —, il m’a fallu en effet réécrire le roman, mais je n’ai pas changé énormément de choses. Si je l’ai ressorti, c’est simplement parce que les éditions Lokomodo m’offraient cette opportunité.

Quels sont tes projets ?

Pour l’heure, je réécris d’anciennes nouvelles fantastiques et j’en ponds quelques inédites pour accompagner la réédition de « La Chair sous les ongles » chez Rivière Blanche, roman gore auquel j’ai ajouté un chapitre final inédit. J’essaie de boucler cela pour février afin que ça puisse sortir aux Imaginales à Épinal. Après, il me faudra retaper mon roman « Silence rouge », non numérisé lui aussi, pour l’envoyer à un petit éditeur qui le réclame. Puis songer à un autre bouquin, puis écrire « Les Dossiers de Harry Dickson » tome 4 à destination des éditions Malpertuis, puis mettre en route la deuxième aventure de Harry Dickson en BD, etc, etc. Le tout dans le désordre, en fonction des exigences et des disponibilités. Avec en outre les propositions nouvelles qui peuvent surgir à tout moment. Ah, j’oubliais, il me faudra aussi trouver un créneau pour me mettre à une nouvelle histoire à l’ancienne comme seul sait en publier Le Carnoplaste, l’excellent éditeur de fascicules, chez qui j’ai déjà sorti deux aventures de Nuz Sombrelieu, mon détective cul-de-jatte des années folles.

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