Sång

Auteur / Scénariste: 

Alienor Lindbergh, jeune stagiaire autiste, apprentie auprès de la profileuse Emily Roy, se voit contrainte de rentrer précipitamment chez elle à Falkenberg en Suède. Ses deux parents et sa soeur viennent d’être assassinés. Sur place, Emily retrouve le commissaire Bergström qu’elle connait bien, et son amie Alexis Castells, l’auteure avec qui elle a déjà enquêté par le passé et qui est plongée dans ses préparatifs de mariage. Les parents d’Alienor travaillaient tous les deux dans une clinique de PMA de Göteborg et sa soeur y avait également travaillé un temps. Leur mort a-t-elle un rapport avec les activités de la clinique ? En parallèle à ce drame s’en tisse un autre, plus ancien, souvenir des horreurs du régime franquiste et de ses orphelinats de la mort. Les deux sont liés bien sûr, mais comment ? Au lecteur de le découvrir, tout au long de cette chasse hallucinante de 280 pages que l’on dévore d’une traite sans reprendre sa respiration.

 

J’ai eu l’occasion récemment de dire tout le bien d’un autre auteure de thriller, Sonja Delzongles. Je réitère mes propos concernant Johana Gustawsson. Il y a quelques années, on évoquait les reines du polar comme Ruth Rendell ou PD James, nous avons désormais de nouvelles reines du thriller. Car Sång est un roman remarquable, jonglant sans cesse entre le thriller historique (la guerre civile espagnole) et le thriller scientifique (la clinique de PMA), mêlant plusieurs histoires qui se déroulent au gré de chapitres courts donc plus marquants, jusqu’à se percuter à la fin du récit. Bien sûr que l’on se doute dès le départ qu’il y a un lien entre les Lindbergh, les jeunes filles de l’ophelinat espagnol, Gordi, Reme, Dulce, Gordi, Launa et Lados, et cette mystérieuse femme qui ne s’exprime qu’à la première personne et ne jure que par son Nino. La construction du roman le laisse supposer dès le départ. Mais bien malin qui pourrait arriver à découvrir le dénouement avant les dernières pages, et c’est là toute la force de ce récit. Entre temps, nous aurons suivi l’enquête d’Emily Roy, apparaissant souvent déconnectée, presque sauvage, toute entière dans ses réflexions, assisté non sans humour aux préparatifs du mariage d’Alexis Castells sous le giron de sa mère, plaint cette jeune Aliénor aux sentiments anesthésiés par le drame, et finalement assez proche dans la description de son caractère d’Emily.

Et puis surtout, Sång est une plongée dans les horreurs de la guerre civile espagnole, guerre tellement proche de nous puisqu’elle dura deux ans jusqu’en 1939 et fit pas loin de 500.000 morts, mais ses effets sur la population durèrent le temps du « règne » dictatorial de Franco jusqu’en 1975. Autrement dit, hier.  Et même si l’auteure ne verse ni dans la complaisance, dans l’émotion surajoutée, il est impossible de ne pas avoir une pensée émue pour la petite Gordi et ses amies de l’orphelinat.

En définitive, il existe peu de romans que je qualifierais de « parfaits » dans le sens où même avec le recul je n’ai aucun reproche ou réserve à apporter. Tant mieux pour l’auteure me direz-vous ! Sång en fait partie. Une incontestable grande réussite de cette fin d’année littéraire, un de mes coups de coeur assurément.

Je remercie les Editions Bragelonne de m’avoir permis de découvrir cette histoire, et Johana pour l’avoir écrite, sans doute dans la douleur.

 

Sång - Johana Gustawsson - Bragelonne - octobre 2019, 21,50 €

Sections: 
Type: