Pierre-de-vie
Ce n’est pas pour rien que ce roman a obtenu en 2010 le prix Mythopoeic, rappelé par son bandeau. Plus que l’histoire, féérique, dans un monde où la magie, appelée yaya, est plus ou moins forte suivant l’endroit, entre l’Orient fabuleux où vivent des dieux dont la nature sera d’ailleurs « expliquée » vers la fin du roman, et l’Occident totalement mécanique, les différents lieux ne vivant pas au même rythme temporel, entre la lenteur de l’Orient et la rapidité de l’Occident, c’est bien à la psychologie des personnages et à la poésie du monde que s’attache l’auteur. La perturbation énorme introduite dans la vie calme, paysanne, d’Applekirk, village des Marches, c’est-à-dire de la région centrale de ce monde, par le retour d’Hanethe, arrière-grand-mère du seigneur local, Ferrand, et par l’arrivée de Jankin, professeur de l’université de Marakanda, bien plus à l’ouest, nous est racontée à travers les souvenirs de Taveth, épouse de Ranal et maîtresse de Ferrand. Dans un monde où le temps n’est pas une donnée stable et où, en plus, Taveth a le don de percevoir des images du passé ou du futur des gens qu’elle regarde, la plupart des faits nous est contée au présent et les rares apparitions du passé ou du futur dans le texte sont choquantes (s’agit-il d’apparitions voulues ou de corrections arbitraires, dans le texte publié original ou dans l’édition française ? Je ne sais pas).
L’essentiel de l’histoire est bien comment, malgré les épreuves et les tourments de cet épisode, la vie reviendra à la normale, au rythme régulier des saisons, des récoltes, de l’entretien de la maison, la pierre-de-vie (dans notre monde on dirait la carrière) de Taveth...
Pierre-de-vie par Jo Walton, traduit par Florence Dolisi, Folio SF n°692, 2021, 417 p., couverture d’Aurélien Police, ISBN 978-2-072-94670-7