LIVYNS Frédéric 04 et LEBLANC J.B. 03
Afin de compléter cette chronique, Frédéric Livyns et J.B. Leblanc ont accepté de répondre à quelques questions pour Phénix Web. Je les en remercie !
Phénix web : Tout d’abord, pouvez-vous nous dire comment vous est venue l’idée de ce projet et l’envie d’écrire un roman à quatre mains ?
JB : Fred m’a contacté un jour, ça remonte à quelques années, pour l’aider à améliorer un roman dont il n’était pas satisfait. En l’état, il s’agissait d’un slasher. Je m’étais alors juste attelé à lui donner des pistes de travail au niveau de l’enquête policière. Suite à cela, Fred a proposé que nous réécrivions l’histoire ensemble. J’ai dit « tope-là ».
Nous avons décidé de modifier la base de l’histoire. Tout d’abord de la transposer en France, parce que nous ne maitrisions pas les codes de police et de justice du pays dans lequel se situait le roman originel. Nous avons abandonné le slasher parce que désuet, passé de mode, trop léger dans le ton et trop visuel pour un roman. Le reste a coulé de source. Huit mois de travail.
Fred : A l’époque, JB était le directeur de la collection fantastique de Val Sombre éditions. Il avait déjà dirigé Danse de sang et je lui avais donc envoyé Eclats d’âmes qui se voulait dans l’esprit des slashers des années 80. Il m’avait confié avoir encore plus aimé ce dernier et c’est à cet instant que j’ai eu envie d’associer nos plumes. JB maîtrise à la perfection les codes du thriller et notre association a donné Le miroir du damné. Comme le dit JB, ce furent huit mois de travail intense mais, au final, je crois que nous pouvons être satisfaits de notre premier roman en duo.
Je confirme que vous pouvez être plus que satisfaits et fiers du résultat ! L’écriture est une activité solitaire. Comment avez-vous vécu cette aventure en duo ? A-t-elle changé quelque chose dans votre rapport à l’écriture ?
JB : pour ma part, aucun changement de méthode. L’écriture est restée un acte solitaire, juste moins intime parce qu’il y avait le regard de Fred.
Fred : Même chose pour moi. Lors des diverses phases d’écriture, nous étions en solitaire mais faisions en fonction du regard de l’autre. Une intimité sous voyeurisme constant lol.
Quelle était votre méthode de travail ? Plus particulièrement par rapport à la construction de l’intrigue et des personnages…
JB : Très simple dans la mesure où Fred avait apporté une base. Nous n’avons pas travaillé chapitre par chapitre en écrivant chacun de notre côté puis en confrontant nos idées ensuite. Trop chronophage. J’ai travaillé sur la première version apportée par Fred une fois que nous avions défini les personnages, le lieu et les prémices de la nouvelle intrigue. J’ai surtout développé le côté thriller. Ensuite, une fois ma version complète du roman achevée, Fred a bossé dessus, apportant sa touche au niveau terreur. C’est donc énormément de temps passé au téléphone, à ce contacter via SMS, mails ou MP Facebook pour être certain de prendre la bonne direction et de prendre les bonnes décisions.
Fred : Travailler en duo peut se comparer à une vie de couple (en tout bien tout honneur, je précise). Tout est une affaire de concession mais, dans la grande majorité, nous étions d’accord sur les tenants et aboutissants de l’intrigue. Nous savions ce que nous voulions et comment le faire. Même si JB a parfois dû me freiner au niveau des idées horrifiques car je plongeais allègrement dans le glauque. Je disais souvent à JB en rigolant que j’étais plus en contact avec lui au cours de ces huit mois qu’avec ma propre épouse.
Vous êtes tous les deux du Nord. Pourquoi avoir choisi de situer l’action du Miroir du damné dans le sud de la France ?
JB : Simplement parce que nous voulions un climat particulier pour créer un sentiment étouffant, un sentiment de malaise tout au long de cette histoire. Le village de Tarsac, là où nous l’avons situé, est imaginaire. Nous avions le choix entre la chaleur et la pluie incessante. Nous avons opté pour la première et nous sommes donc partis au sud.
Fred : Il nous fallait un cadre spécifique, oppressant. Le climat devait se montrer aussi rude que les villageois afin que le lecteur se sente cerné de toutes parts. C’est pour cette raison que nous avons opéré le choix dont parle JB.
Votre écriture est très visuelle. On imaginerait bien une adaptation du Miroir du damné sur grand écran. Pouvez-vous nous parler de l’influence du cinéma dans votre vie et sur votre style d’écriture ?
JB : Si le cinéma influe sur mon écriture, c’est de manière inconsciente. Mais en cinéphile, c’est bien possible que certaines images trainent encore dans mon esprit et guident mon imagination. Cependant, il m’est parfois arrivé, au sortir d’une séance de cinéma, de me dire que ce film serait difficile à transposer en roman tant il est visuel. Tout le paradoxe…
Fred : Cette corrélation est amusante car elle revient systématiquement lorsque je fais paraître un roman. JB et moi provenons de la même école, si je puis dire. Nous nous nourrissons de films et de lectures donc cela a forcément déteint sur notre écriture. Pas besoin d’une longue description pour faire peur au lecteur, pour l’emmener avec nous. Il suffit de trouver la bonne corde et de la faire vibrer.
Frédéric, tu as gagné deux fois le prix Masterton pour tes nouvelles. J.B., tu es jury de ce même prix littéraire. En lisant votre roman, j’ai bien entendu pensé au Miroir de Satan, que Graham Masterton a écrit en 1986. L’ombre du maître semble planer au-dessus de nous lorsqu’on lit Le miroir du damné. Vous assumez cette référence ?
JB : Pleinement ! Graham Masterton est un auteur de qui je me sens proche ! J’ai dévoré bon nombre de ses romans au tout début des années 90 grâce à la fameuse collection Terreur (Note de Phénix Web : les romans de Graham Masterton ne sont malheureusement plus édités en France. Bragelonne commence cependant à en republier certains) Il transpose à merveille de vieilles légendes dans notre société moderne.
Fred : Poser la question, c’est y répondre. Les personnes qui me suivent savent très bien que je suis un fan absolu de Graham Masterton depuis maintenant près de 35 ans. Il est l’un des plus grands auteurs de terreur qui n’ait jamais existé, celui qui m’a donné l’envie d’écrire (avec Brussolo). Ce n’est donc pas un hasard si notre univers porte sa marque en filigrane. JB et moi assumons cette référence sans aucun problème.
Il n’est déjà pas facile de publier un roman, alors un roman écrit à quatre mains, j’imagine que ce doit être encore plus difficile ?
JB : Là, c’était la partie de Fred. J’avoue ne pas m’en être vraiment occupé. Nous avions établi une liste de maisons d’édition à la ligne éditoriale adéquate et Fred s’est occupé des soumissions. Nous avons essuyé quelques refus, pour diverses raisons, avant d’obtenir un oui.
Fred : Plus difficile, oui et non. Le travail de démarchage est le même. Bien sûr, tout ne s’est pas passé comme sur des roulettes, nous avons traversé des phases de doute mais je n’abandonne jamais un projet. Je me suis accroché comme un chien à son os car j’avais pleine et entière confiance dans la qualité du Miroir du damné.
Voulez-vous nous présenter la maison d’édition qui a publié Le miroir du damné, Séma éditions ?
JB : Séma, une petite maison d’édition belge mais très ambitieuse et dynamique. Elle se structure à son rythme et s’entoure d’excellents professionnels à tous les niveaux du processus. Elle propose déjà un catalogue bien fourni.
Fred : Je connaissais l’éditeur, Michael Schoonjans, depuis quelques années déjà. Il était chroniqueur littéraire et diffuseur avant de lancer sa propre maison d’édition. Il m’avait confié être fan des Contes d’Amy, recueil avec lequel il avait découvert mon univers. En tant que diffuseur, il m’accueillait sur son stand afin que je puisse dédicacer les romans qu’il distribuait. Avec le temps, notre relation s’est transformée en amitié et collaborer avec lui est un réel plaisir. Nous avons parlé de ses envies d’édition lors d’un salon et je lui ai soumis ma trilogie des Grisommes dont seul le premier tome était terminé. Il a signé de suite. Depuis, nous avons signé ensemble pas moins de 7 projets. Il est direct, il aime ou pas, il dit les choses franchement. Il est entouré d’une excellente équipe ultra-exigeante qui nous a forcés à donner le meilleur de nous-mêmes. Le catalogue de Séma édition est d’une grande qualité et donne sa chance à de nouveaux talents.
Fréderic, cette question t’est destinée. Le genre fantastique est dénigré en France, pour ne pas dire plus, et celui d’horreur est carrément à l’abandon. Qu’en est-il en Belgique, où vu d’ici, on a l’impression que la situation est meilleure ?
Fred : Je te rassure (ou pas, c’est selon), ce n’est qu’une impression. Le Belgique est victime des mêmes préjugés envers la littérature fantastique et d’horreur. Mais je n’en ai rien à faire. J’écris pour le plaisir, c’est mon principal moteur. Tant que j’en ressens du plaisir à raconter mes horribles petites histoires et que les lecteurs en éprouvent également, c’est le principal. Le fantastique, c’est ma came, je ne suis pas prêt de l’abandonner. Je ne dis pas que je n’essaierai pas d’autres genres à l’avenir car j’aime diversifier mon écriture mais ma base est et restera toujours le fantastique.
J.B., tu es référencé comme auteur de thrillers fantastiques. Est-ce que cette description te semble juste ?
JB : Pleinement. A ce jour, tous mes écrits publiés sont teintés de fantastique ou de surnaturel (je vous laisse débattre sur la nuance). La trilogie du Cauchemar de Cassandre est un thriller sur fond de complot luciférien donc je ne peux rien renier. Les passeurs, tome 1 et 2, il s’agit d’une enquête policière dans le milieu des passeurs d’âmes. J’aime confronter le thriller et le fantastique, le monde de la preuve à celui de la croyance. Les deux se marient bien et je dirais même qu’ils se rendent service. Le thriller permet d’ancrer le fantastique dans le réel et de le rendre vraisemblable.
Un mot sur vos projets ?
JB : J’ai achevé l’écriture d’un thriller pur intitulé Résurgences. Je ne dévoilerai pas l’intrigue ici. Le processus de bêta-lecture et de correction est terminé. Je vais bientôt m’atteler à l’écriture d’un autre thriller, sans fantastique toujours, en reprenant le personnage central de Résurgences. L’idée d’un personnage récurrent me titille. J’ai mille aventures à lui faire vivre. Après, ceux sont les lecteurs qui décideront. Si Résurgences n’est pas bien accueilli…
Fred : Le 27 mai 2017 sortira Histoires à faire peur… mais pas trop sous le pseudonyme de Livéric. Il s’agit d’un artbook regroupant 4 histoires écrites à la base pour démystifier les terreurs nocturnes de mes enfants. Il est donc destiné aux touts petits. Il sera illustré par Priscilla Grédé. Toujours aux éditions Séma. La sortie officielle se fera au salon « Le château sous les étoiles ». Le 24 septembre 2017 paraîtra Dark gates of terror, toujours chez Séma Editions. Un artbook pour les adultes, dans l’esprit des anciens comics, regroupant 6 histoires illustrées par Christophe Huet. La sortie officielle aura lieu aux « Aventuriales de Ménétrol ». Fin novembre2017 paraitra Rédemption, le troisième tome de la série jeunesse Les Grisommes, encore chez Séma Editions. Les illustrations intérieures seront réalisées par Philippe Lemaire. La sortie officielle se fera au salon « Mons Livres ». En 2018 paraîtra Le sang du passé aux éditions du Petit Caveau et Les aventures de l’inspecteur Cox Innel destiné aux petits aux éditions Séma. La seconde saison des Nouvelles aventures de Carnacki est en cours d’écriture pour les Editions L’ivre-Book, Pluie de sang qui est la suite de Danse de sang est en cours d’écriture, Le nécrophone en collaboration avec Anthelme Hauchecorne avance également ainsi qu’un autre projet à 4 mains avec un autre auteur.
Vous avez beaucoup de projets ! Malgré cela, je suis certains que les lecteurs du Miroir du damné vont en redemander. Alors, seriez-vous prêts à remettre ça tous les deux ?
JB : Pour être honnête, nous avions évoqué l’idée d’une suite mais nous l’avons laissé tomber. Nous risquions de nous répéter. Cependant, nous réfléchissons à une nouvelle association. Une histoire différente, peut-être en reprenant un ou deux personnages du Miroir du damné. Fred et moi avons pris beaucoup de plaisir à explorer l’univers de chacun.
Fred : Tu peux être certain que J.B. et moi allons encore écrire ensemble car on a franchement adoré l’exercice !