Gnomon

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L’idée de base, celle de l’enquêteur explorant les données souvenirs d’un mort telles que récupérées par un système de surveillance universel, et découvrant une faille du système (ou, dans le cas présent, une tentative de détournement), je l’avais déjà rencontrée, beaucoup moins approfondie, dans un roman que Nick Harkaway ne connait sûrement pas, mais que je ne peux m’abstenir de signaler aux amateurs de SF francophone, 33° itération, de Yvan Bidiville, paru en 2012 chez Rivière Blanche et réédité chez Actu SF. Bien entendu, Nick Harkaway va beaucoup plus loin que Yvan Bidiville, et nous donne le monument dont je pressentais la possibilité en 2012.

 

La base est donc celle d’une société future dans laquelle le Témoin, c.c’est-à-dire un système « intelligent » de surveillance généralisée par caméras à reconnaissance faciale, drones et agents humains, assure la sécurité des Anglais, plus précisément ici des Londoniens, dans un système politique basé sur la démocratie directe, la consultation permanente de tout le monde sur tous les sujets. Système qui comporte une autocorrection, puisque c’est la mort d’une personne interrogée, l’écrivain Diana Hunter, sur laquelle enquête l’inspectrice Mélikki Neith. Mais cette enquête, la consultation de l’interrogatoire qui a provoqué la mort de la personne interrogée, dérive sur l’apparition de « souvenirs » de trois personnes fictives, un financier grec, une alchimiste du Moyen-âge, un peintre et créateur informatique né en Éthiopie au vingtième siècle et lié à la création d’un jeu informatique qui aurait précédé le Témoin. Et ces « souvenirs » tournent autour de concepts divers, expriment de façon variée les idées, les craintes et les dénonciations de Diana Hunter. De plus, pendant que Mélikki Neith explore ces « souvenirs » à la recherche du secret que Diana Hunter voulait défendre, de nouvelles morts révèlent l’existence d’une menace contre le Système, menace dont le Témoin ferait peut-être partie...

 

À travers les explorations de l’enquêtrice et les longues explications, par ses « souvenirs », de la pensée de différents personnages et de leurs visions sur la réalité du monde, nous découvrons les possibilités et les risques de l’évolution en cours des « intelligences » artificielles. Et de leur éventuel détournement...

Une œuvre passionnante, donc, et qui demandera certainement relecture, discussion, réévaluation.

 

Gnomon de Nick Harkaway, traduit par Michelle Charrier, Albin Michel Imaginaire, 202, 2 volumes, 488 et 425 p., couvertures d’Aurélien Police, 24,9€/pc, ISBN 978-2-226-44365-6 et 44366-3

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