Feu et sang
« Au septième jour, une nuée de corbeaux jaillit des tours de Peyredragon pour propager la parole de lord Aegon aux sept couronnes de Westeros. Ils volaient vers les sept rois, vers la citadelle de Villevieille, vers les seigneurs tant petits que grands. Tous apportaient le même message : à compter de ce jour, il n’y aurait plus à Westeros qu’un roi unique. « Trois cents ans avant les événements du Trône de fer, Feu et sang raconte l’unification des sept royaumes.
Je possède les intégrales du Trône de fer depuis quelques années déjà mais j’attendais que les images de la série télévisée Game of thrones soient moins vives dans ma mémoire pour m’y plonger. Et puis Feu & sang m’a été proposé en SP, alors je me suis dit : pourquoi ne pas commencer par ce livre qui est un préquel et narre les trois cents ans précédant GOT ? Cela me semblait être une bonne entrée en matière. J’ai donc entamé ma lecture toute contente de cette opportunité et autant vous dire tout de suite que j’en attendais énormément. Mais j’ai été fort déçue et je vais vous expliquer pourquoi.
Tout réside dans le verbe que je viens d’employer plus haut : « narrer ». Car c’est là, à mon sens, que le bât blesse : ce pavé – un semi-poche de 850 pages quand même – n’est pas un roman proprement dit mais un rassemblement de chroniques, de témoignages racontant l’histoire des sept couronnes et nommant par le menu toutes les personnes des arbres généalogiques plutôt fournis de tous les seigneurs de toutes les contrées de Westers. La plupart du temps ce n’est qu’une narration de faits, une longue litanie de mariages, de descendance, de coalitions, d’alliances, de batailles, de révoltes, de guerres intestines et fratricides, de conspirations, de traîtrises et de trahisons, de meurtres et d’assassinats, de tortures et d’exécutions. Cela m’a fait penser parfois au début, long comme un jour sans pain, de la Genèse de la Bible mais surtout à un cours magistral sans saveur déclamé par un professeur qui ne saurait aucunement faire « vivre » l’Histoire. Il n’y a pas de dialogues et le lecteur – moi en tout cas – se sent un peu étranger et ne rentre jamais tout à fait dans l’intrigue. J’ai trouvé cela fort dommage car il y a pourtant matière à réussite dans ce bouquin, notamment lors de la partie intitulée La danse des dragons, que j’ai trouvée plus intéressante que les autres. De quoi me demander très sérieusement si je vais me résoudre un jour à lire Le trône de fer…
Je suis cependant contrainte de reconnaître l’inventivité de l’auteur et d’admirer le foisonnement de son imagination, tout en me demandant quand même comment il fait pour ne pas se perdre lui-même dans la pléthore de protagonistes dont, qui plus est, les prénoms se ressemblent souvent. Une déception pour moi donc que ce Feu et sang, qui porte bien son titre mais qui, je le crois sincèrement, aurait gagné à paraître sous une autre forme, moins narrative et plus romancée.
Parue sur Beltane (lit en) secret
Feu et Sang par George R. R. Martin paru chez J'ai lu, Prix 16,90 €