Faiseur d'histoire (Le)

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Ce gros roman reprend l’idée de l’élasticité de l’histoire et que ce qui ne serait pas accompli par un personnage le serait par un autre, idée déjà proposée par Barjavel dans Le Voyageur imprudent. Il ajoute l’idée classique comme quoi en voulant améliorer une histoire, on peut produire une aggravation à la place de l’amélioration attendue, idée très joliment traitée dans le court roman de Paul Guimard L’Ironie du sor. Un monde où Hitler ne serait pas né serait-il meilleur ? Stephen Fry nous répond avec cette histoire pleine d’humour que rien n’est moins sûr.

Le roman raconte comment le héros, étudiant anglais à Cambridge bourré de complexes parfois justifiés et maladroit comme ne saurait l’être qu’un personnage de feuilleton télé britannique, va se trouver en position de changer l’histoire en empêchant la naissance d’Hitler. Et nous entrons dans la deuxième partie où le héros se retrouve dans la peau de celui qu’il serait, étudiant à Cambridge (USA) dans un monde où l’Allemagne nazie a conquis l’Europe grâce au machiavélisme du Führer Gloder, où les États-Unis sont restés un pays d’un puritanisme à côté duquel Georges Bush II passerait pour un bolchevik hippie. Et où il est le seul à avoir conscience du changement de trame historique à partir de 1932 et va devoir trouver le moyen d’annuler le changement...

Il est évident que Stephen Fry a pris grand soin d’éviter les grosses erreurs historiques et de construire une histoire parallèle vraisemblable, en respectant les données historiques utilisées même s’il y a rajouté des personnages utiles au roman. Les seules invraisemblances qui exigent une suspension d’incrédulité importante sont les ressemblances non motivées entre les deux histoires qui permettent au héros de parvenir à rectifier sa correction d’histoire.

Le roman est bourré d’épisodes amusants, de changements de rythme de narration qui rappellent que Stephen Fry est, d’abord, un humoriste de radio ou de télé. Mais il parvient ainsi à éviter toute lassitude du lecteur malgré la longueur du roman qui ne paraît pas du tout excessive.

Patrick Marcel a réussi à traiter de façon très correcte les problèmes linguistiques sérieux que présentait, dans la seconde partie du roman, les nombreux jeux de langage entre l’anglais de Cambridge (UK) et celui de Cambridge (USA), ces innombrables différences difficiles à rendre en français entre culture et vocabulaire britanniques et leurs correspondants américains. Avec, pour compliquer la traduction, la présence de passages en allemand ou en français. Dire qu’il a réussi un sans-faute n’est pas garanti, mais je n’ai réagi à aucune erreur flagrante et ai pu apprécier un certain nombre de réussites.

En bref, un roman qui devrait au minimum vous fournir un bon moment de lecture agréable.

Le Faiseur d’histoire par Stephen Fry, traduit par Patrick Marcel, suivi d’une postface par Axel Orgeret-Dechaume, 645 p., couv. Sam Van Olffen, F10, ISBN 978-2-07-043996-6, Folio SF n°397, 2011

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