Galaxies Nouvelle Série n° 47

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Disons-le d’emblée : un excellent numéro.  Pour le dossier – on y reviendra – mais aussi pour la qualité des nouvelles retenues.

 

Pas de véritables «  stars »  cependant, mais huit auteurs intéressants. Amalgame,  de l’Italien Ivo Torello, est un conte cruel sur des corps physiquement liés. Tour de force littéraire, Aurore, de Didier de Vaujany, passe du rêve à la réalité, de la SF à la fantasy, de l’aventure à l’émotion. Cindy Van Wilder, Belge, dans Terre de brume, transpose brillamment en SF le drame des migrants. En neuf pages, faut le faire !

La nouvelle la plus extraordinaire est peut-être Montre-nous ton pouvoir, de Pierre Bameul, auteur trop rare. L’action se déroule durant la guerre franco-prussienne de 1870. Le cuirassier Marc Gosselin, grièvement blessé, est recueilli par les Allemands, qui ont remarqué qu’une montre l’a miraculeusement sauvé. Cette montre, cadeau du grand-père de son épouse, possède des pouvoirs dont veulent s’emparer des conspirateurs afin de tuer Bismarck et restaurer une Allemagne pacifique, non-militariste. Le héros acquiesce et Bismarck est enlevé en zeppelin. Hélas, la foudre frappe... Un texte brillantissime.

Plus anecdotique, mais amusant, La lune factice, de Céline Maltère, imagine un canular : la Lune a disparu, explosée au XIIIe siècle, et celle que nous connaissons est en carton-pâte !

Suit un nouveau texte remarquable, La Route en rond, d’un certain Christian Jordan. J’écris «  un certain »  car Jean-Pierre Fontana, concepteur de ce numéro de «  Galaxies », raconte avoir reçu et transmis le texte à Alain Dorémieux qui le publia dans « Fiction ». Depuis, plus personne n’a revu l’écrivain. Or la nouvelle est fabuleuse. Dans un monde inconnu, les gens marchent sur la Route, sans fin, redoutant de tomber dans les nuées, où les attendent « Ceux-d’En Bas ». Il y a bien des lieux où l’on dort, des abris où l’on mange (à des alimentateurs, qui parfois ne donnent rien). Herv rencontre Etoile, et  ils marchent à deux. Il se pose des questions : qu’est ce que la rRute ? Pourquoi ces nuées ? Qui sont « Ceux-d’En Bas » ? Etoile aime Herv, mais ne parvient pas à le suivre dans ses interrogations, trop liée au monde qu’elle connaît. C’est alors qu’Herv sort de la Route et saute dans les nuées...

Très bon aussi le texte du programmeur Martin Shoemaker, qui nous parle par la voix d’un robot empathique : il prend, l’un après l’autre, l’identité de membres de la famille autour d’une très  vieille dame. De la SF palliative, en quelque sorte. Aujourd’hui, je suis Paul, déclare-t-il, et demain, qui sera-t-il ? Les couche-tard enfin, nouvelle de Bruno Pochesci, mais qui nécessite tout de même un zeste de culture. Ou comment des savants très connus se retrouvent dans un motel minable géré par un horrible cafetier de droite, et, par la grâce de l’auteur, finissent dans un célèbre tableau d’Edward Hopper.  Brillantissime.

 

Le dossier de Jean-Pierre Fontana est consacré au mythe du Royaume du Prêtre Jean. Communauté chrétienne située au Proche-Orient ou en Éthiopie, l’Église souhaitait sa collaboration pour prendre les musulmans en étau lors des croisades. Mais on n’a jamais pu prouver l’existence de ce royaume, resté aussi mythique que celui de la reine de Saba. Une bibliographie témoigne de l’intérêt de la thématique, qui compte quelques grands noms tels Pierre Benoît, Juan Miguel Aguilera, ou Umberto Eco. La nouvelle qui s’y rattache, de Danny Mienski, se borne à imaginer un esclavagisme inversé : les Noirs y font la traite des Blancs.

 

La rubrique cinéma aborde un autre mythe, bien moins connu : la Chasse-Galerie. Répandue au Québec par des colons vendéens, elle conte la chasse fantastique d’un seigneur qui doit expier un péché. La musique a beaucoup traité ce thème (Schubert, Franck, Duparc, Guiraud, Wagner, Schönberg). En littérature canadienne, on le retrouve chez Honoré Beaugrand en1900, et à l’écran, Jean-Philippe Duval en 2016, comme nous l’explique Jean-Pierre Fontana, au terme de ce numéro très riche.

 

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