VAGLIO Mélusine 01

Dites-nous quelque chose à votre propos : qui êtes-vous ?

Une rêveuse pragmatique, un satellite en orbite, une fée High-Tech, une boîte à idées…

A quel âge avez-vous commencé à écrire ?

Après ma Khâgne, j’ai rencontré une Américaine qui suivait un atelier d’écriture à la Sorbonne. Au bout d’un mois, elle avait produit une nouvelle d’une vingtaine de pages. Je me suis dit : pourquoi pas moi ?

Vous souvenez-vous encore de vos premiers textes ? Que sont-ils devenus ?

Des articles, un roman, un scénario, deux essais… au fond d’un tiroir.

Comment écrivez-vous ? Est-ce une profession pour vous ? Quelles sont vos autres passions ?

Quand je suis dans la phase d’écriture, j’écris tous les jours. Plutôt qu’une profession, un besoin d’échapper au réel et surtout un désir de réalisation qui prend toute la place.
Mes autres passions : la musique, l’art contemporain, le yoga, les voyages.

Votre série « Kitty Lord » est fortement imprégnée d’histoires méconnues de la Bible. Comment avez-vous découvert ces éléments qui sont le squelette de l’histoire ?

Je connaissais vaguement le mythe des Néphilim et quand j’ai découvert les Ecrits Intertestamentaires publiés dans la Pléiade, j’ai été surprise de voir que des livres entiers avaient été consacrés à cette histoire – notamment le plus connu appelé Le Livre d’Enoch. Certains apocryphes, comme Le livre de Lamech, prétendent même que Noé était peut-être un Néphilim ! Toutes ces histoires sont aujourd’hui méconnues. Pourtant, jusqu’à Saint Augustin, la plupart des chrétiens ont vraiment cru que des anges déchus étaient descendus sur Terre pour s’accoupler avec des terriennes, donnant naissance aux fameux Néphilim dont je parle dans Kitty Lord.

Pas plus tard qu’hier, j’ai visionné un épisode de la série X-Files, saison 5, « Une âme en peine ». L’héroïne serait justement une Néphélim engendrée avec ses 3 sœurs quadruplées par un séfarin. Avez-vous vu cet épisode ? Si oui, est-ce à partir de là (épisode diffusé en 1998) que votre intérêt s’est éveillé ?

Je n’ai jamais vu cet épisode. Je dois avouer, au risque de choquer les lecteurs de Phénix, que je ne possède plus la télé depuis 2000… L’image exerce sur moi une fascination qui m’oblige à être radicale. Je préfère aller au cinéma.

Quel est votre avis sur le fait que ce mystère religieux (volontaire de la part des autorités ecclésiastiques) n’ait pas suscité encore plus d’engouements pour des histoires de l’Imaginaire ?

Parce que le simple fait d’évoquer la Bible fait peur. Or, les premiers livres de la Bible offrent un éventail de mythes aussi beaux et poétiques que l’Iliade et l’Odyssée, chefs-d’œuvre composés à peu près à la même époque que la Genèse, au 8ème siècle avant J.-C.
Il y a une réticence à puiser dans ce patrimoine-là, parce que la Bible est avant tout un texte sacré. Moi, je l’utilise comme un intertexte fondateur de notre culture. On voit bien que le dualisme Bien/Mal innerve toutes les grandes épopées, d’Harry Potter au Seigneur des Anneaux en passant par La Guerre des Etoiles. Mais aucune de ces histoires ne remonte à l’origine de l’affrontement ou ne cherche à l’expliciter. Ce que j’ai tenté de faire dans Kitty Lord… À l’origine, il y a un problème dans la dimension surnaturelle qui se répercute ensuite dans notre dimension.

Est-ce volontairement que votre héroïne a l’âge de vos élèves de collège ? Avez-vous écrit pour les faire lire ou parce que vous connaissez bien cette tranche d’âge ?

Onze ans, parce que c’est l’âge où on peut se plonger dans des livres plus consistants. Onze ans, parce c’est un rite de passage qui correspond à l’entrée en 6ème. C’est le premier grand cap de l’existence.

Pourquoi finir ainsi la série ? Personnellement, un volume 5 n’aurait pas semblé « celui de trop ».

Votre commentaire me touche beaucoup. « The never ending story »… Ce serait la série la plus géniale à écrire… J’adore l’idée d’une saga qui ne finisse jamais.

Avez-vous remarqué l’intérêt manifesté par vos lecteurs ? Notamment sur le site de Phénix, ce sont de loin, les articles les plus commentés ?

Je suis toujours dans le doute par rapport à l’intérêt suscité par Kitty. Mes amis proches ne lisent jamais mes livres car ils sont adultes. Mes fans sont des élèves (surtout les élèves de 6ème qui sont adorables) ou les lecteurs que je rencontre pendant les salons. Merci à mes lecteurs et à Phénix ; comme tout le monde, j’ai besoin d’encouragements.

Petit détour « professionnel » pour le prof de français : l’orthographe se néglige au profit du langage SMS. Y voyez-vous un appauvrissement de la communication ou un enrichissement de la créativité ?

Je n’y vois pour le moment qu’un appauvrissement de la langue – déformation professionnelle oblige ! Mais je ne demande qu’à être convaincue du contraire.

Pensez-vous continuer dans l’Imaginaire ou passer à une histoire plus traditionnelle ?

L’imaginaire est nécessaire. Le genre réaliste, avec le déterminisme social qu’il implique, a toujours été à l’encontre de ce que je crois fondamentalement : tout est possible si l’on s’en donne les moyens. Mais pour cela, il faut que les parents aient rêvé sur leurs enfants et que les enfants eux-mêmes aient des rêves. L’accès à son inconscient, à son monde intérieur est pour cela capital, d’où mon désir de privilégier l’imaginaire.

Pourquoi l’écriture ? Quel est, selon vous, le rôle de l’auteur dans notre société ?

L’écriture, parce que j’ai fait des études de Lettres. Le rôle de l’auteur est peut-être de dire qu’il ne faut pas s’enfermer dans des systèmes idéologiques, que la liberté de l’individu est la chose la plus précieuse au monde. L’écriture représente une parole libre et je me représente l’écrivain comme un électron libre, comme un chamane moderne porteur d’espoir.

La subversion, l’engagement politique a-t-il toujours sa place dans le choix d’écrire de la science-fiction plutôt qu’autre chose ?

Pour moi, c’est l’accès à la dimension spirituelle en nous qui est essentielle. Ce qui peut apparaître comme subversif évidemment. Je fais le pari que le cosmos est trop extraordinaire et que nous sommes nous-mêmes trop extraordinaires pour n’être que de la pure matière. Nous sommes certes constitués de neutrons, de protons et d’électrons mais quelque chose de grand réside en nous, que nous passons notre temps à étouffer. Notre vision limitée du réel ne nous aide pas : nous vivons entre un infiniment grand et un infiniment petit, deux mondes invisibles sidérants de beauté et de magie et nous passons notre vie sur terre empêtrés dans des problèmes qui nous font oublier ces dimensions fabuleuses dans lesquelles nous sommes immergés tous les jours. Le fantastique et la science-fiction sont les genres les plus ouverts à ce genre de considérations.

Considérez-vous la SF comme faisait partie de la littérature, ou ne faisant pas partie du mainstream ?

La SF fait évidemment partie de la littérature ! C’est là que l’on rencontre le plus d’esprits lucides. C’est une littérature qui a une vraie vision sur le monde.

Quel est votre auteur de fantastique préféré ?

Philip K. Dick, dont je rêve de pouvoir lire l’intégralité de l’Exégèse. À quand la publication ?

Quel est votre auteur de littérature générale préféré ?

Colette.

Quel est votre roman de fantastique préféré ?

La « trilogie divine » de P.K. Dick (Siva, l’Invasion divine, la Transmigration de Timothy Archer)

Quel est votre roman hors fantastique préféré ?

La tétralogie des Claudine de Colette.

Quel est votre film de fantastique préféré ?

La tétralogie Alien, que je connais par cœur à laquelle j’ai consacré un des essais au fond du tiroir. Vous voyez combien j’apprécie les séries !

Quel est votre film hors fantastique préféré ?

La Mort aux trousses, Autant en emporte le vent, l’Affaire Thomas Crown, l’Arrangement… Difficile de choisir… Les films de Visconti, ceux de Cronenberg, de Cassavetes…

Quel livre d’un autre auteur auriez-vous désiré avoir écrit, soit parce que vous êtes jaloux de ne pas avoir eu l’idée le premier, soit parce que vous auriez traité l’idée d’une autre manière ?

Harry Potter ! Que je tiens pour une œuvre géniale. Rowling a su créer un monde captivant avec des personnages très attachants. Une fois le livre ouvert, on ne peut plus s’arrêter. C’est ça le pouvoir incroyable de la littérature : nous faire oublier le réel et nous propulser dans la dimension imaginaire.

Quel est votre principal trait de caractère ?

L’obstination.

Qu’est-ce qui vous énerve ?

La bêtise.

Outre l’écriture, quels sont vos hobbies ?

La lecture. J’aimerais collectionner des œuvres d’art contemporain.

Quel est le don que vous regrettez de ne pas avoir ?

Le don d’ubiquité.

Quel est votre rêve de bonheur ?

Luxe, calme (pas trop non plus) et volupté, avec mes amis.

Par quoi êtes-vous fascinée ?

L’exceptionnel. Les destins et personnalités d’exception. Dans tous les domaines.

Vos héros dans la vie réelle ?

Ceux qui ne renoncent pas à leurs rêves.

Si vous rencontriez le génie de la lampe, quels vœux formuleriez-vous ?

Tout avoir, tout connaître dans le monde visible et invisible…

Votre vie est-elle à l’image de ce que vous espériez ?

Tout est en nous : le paradis, l’enfer, l’espoir… Alors ça dépend de mon humeur très cyclothymique.

Citez-nous 5 choses qui vous plaisent.

 L’amitié folle

 Le travail comme une drogue

 Les voyages courts et longs

 L’amour fou et romantique

 La physique quantique

Cinq choses qui vous déplaisent

 L’intolérance

 Le fanatisme religieux

 La vulgarité

 Les guerres

 Le conformisme

Last but not least une question classique : vos projets ?

Les concrétiser tous ! ;-) ;-)

Critiques des "Kitty Lord" ici : le 3 et le 4 !