Reine de l'hiver (La) et Reine de l'été (La), Le cycle de Tiamat T1 et T2

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Cette œuvre dont l’importance est énorme n’avait pas été rééditée depuis 1986. Or il s’agit d’un univers-monde qu’on peut comparer sans hésitation aux cycles de Dune, dont le premier volume reprend un certain nombre de thèmes, et de Fondation, évoqué dans le troisième roman.
À Dune, il reprend entre autres l’idée d’une planète essentielle à l’Empire, ou plutôt ici à l’Hégémonie qui a succédé à l’Empire humain disparu du fait d’un produit, le sang des ondins, créature qui n’existe que sur Tiamat. Sang qui apporte sinon l’immortalité du moins le rajeunissement aux puissants des autres planètes, ce qui les incite à maintenir Tiamat dans un état de dépendance et de sous-développement.

À Fondation, La Reine de l’été reprend l’idée d’un groupe secret créé par des savants, ici les physiciens Mede, Ilmarinen et Vanamoïnen, afin de maintenir ou retrouver les sciences perdues de la splendeur de l’Empire et de retrouver les nanotechnologies perdues, en particulier celle du voyage supra-luminique.
Mais Tiamat est, tout autant d’Arrakis, une planète tout à fait particulière dans l’Hégémonie, ensemble limité à huit planètes liées entre elles par des Portes Noires, c-à-d des trous noirs entre lesquels le voyage est possible. Hégémonie est dominée par la planète Karemough et ses Techniciens.
Ce qui met à part Tiamat, c’est d’abord le fait que le trou noir qui en est la Porte a capturé deux soleils. L’orbite de ces deux soleils et de Tiamat autour du trou noir provoque la séparation de l’année Tiamataine en deux périodes : l’une, l’Hiver, où toute la planète est tempérée et où la communication avec le reste de l’Hégémonie est possible. L’autre, l’Été, plus chaud et pendant lequel la Porte est inaccessible. De ce fait, les extra-mondains viennent en Hiver commercer avec une partie de la population, les Hiverniens, et leur offrir l’usage des technologies développées dans l’Hégémonie. Et, avant tout, ils viennent chasser les ondins et s’emparer de leur sang, l’ « eau de vie » des puissants. Pour assurer la continuation de cet échange inégal, ils veillent, quand l’Été et la fermeture de la Porte à cause de la position d’un soleil leur interdisent de venir chercher leur butin, à forcer la planète à retomber dans le sous-développement : tous les appareils installés sur Tiamat sont mis hors d’usage. Le gouvernement de la planète est confié aux Étésiens, pêcheurs et nomades des îles, ennemis de toute technologie, lesquels doivent, du fait de la chaleur, émigrer vers le Nord et se mêler aux Hiverniens.

 

L’arrivée de l’Été est marquée par le sacrifice de la Reine de l’Hiver et son remplacement par une Reine de l’Été sélectionnée chez les Étésiens. Mais la Reine de l’Hiver, Arienrhod, n’entend pas laisser sa place et sa vie qui, grâce à l’eau de vie des ondins, dure depuis 150 ans. Aussi a-t-elle imaginé un plan qui passe par la naissance d’un clone. Des neuf clones implantés 25 ans avant le Festival, un seul a survécu. C’est Moon Marchalaube Étésien. Celle-ci, bien qu’amoureuse de son cousin Sparks, est devenue une sybille, une voix de la Dame de la Mer. Aussi Sparks a-t-il rejoint la ville d’Escarboucle où la Reine essaye de l’utiliser pour tendre un piège à Moon. Et c’est là que le plan d’Arienrhod va dérailler : par suite d’incidents imprévus, Moon est entraînée loin de Tiamat, jusqu’à Karemough. Et y apprend un certain nombre de choses sur le fonctionnement de l’Hégémonie et sur l’exploitation de Tiamat. Quand elle parviendra à revenir chez elle, de façon illégale, elle est résolue à changer cet état de choses, à devenir la reine de l’Été pour pouvoir faire évoluer sa planète vers l’indépendance.

Les trois romans racontent comment elle y parviendra, comment, sur une autre planète, un policier karemoughi, B Z Gundhalinu, qui a connu et aimé Moon au temps de l’Hiver, va redécouvrir le secret du voyage ultra-luminique et, ainsi, menacer l’indépendance en construction de Tiamat, et comment Moon et BZ Gundhalinu finiront par sauver Tiamat. Quelques petites invraisemblances dans leur réussite, mais aurait-il fallu les sacrifier à un respect excessif de la méchanceté vraisemblable du réel ?

Ce space-opera flamboyant est servi par la profondeur des analyses des personnages et la poésie des récits de Joan D. Vinge. Même si les trois romans qui constituent le cycle ont, chacun, leur atmosphère et leur rythme distinct de ceux des autres, il serait à mon avis faux de prétendre en préférer un et rejeter les deux autres : le cycle est une œuvre globale. Et une œuvre maîtresse, qui ne pâlit pas des comparaisons que j’ai faites plus haut.

Relisez-le si vous l’avez déjà lu, découvrez le dans le cas contraire. Vous ne devriez pas être déçu du voyage vers Tiamat et des promenades accessoires sur Kharemough et Numéro Quatre (la planète de Finismonde).

Le Cycle de Tiamat, par Joan D Vinge, Mnémos collection Dédales 2011
Tome 1 : La Reine de l’hiver, traduit par France-Marie Watkins, et Finismonde, traduit par Gérard Lebec ; 622p., couv. Alain Brion, 24€, ISBN 978-2-35408-124-9
Tome 2 : La Reine de l’été, traduit par Gile Burkwatkle, 755p., couv. Alain Brion, 24€, ISBN 978-2-35408-125-6

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