Transitions
Ann Leckie revient dans l’univers du Radch, mais en dehors du dit Radch, ce qui lui permet de présenter de manière plus fouillée les Presgers et leurs Traducteurs, et aussi de poser de manière un peu plus complexe les questions de gendre[1], puisque, en dehors du Radch, les différents gendres sont désignés par des termes différents et non plus uniformément par le féminin. Ce roman est donc nettement plus complexe que la trilogie de l’Ancillaire.
Il comporte trois personnages principaux, dont les points de vue alterneront, ainsi qu’occasionnellement ceux d’autres personnages.
Le premier personnage, Mx Enie Athtur, est une jeune personne qui, à la mort de sa Grand-Mère, se voit obligée de quitter la maison où elle soignait celle-ci pour partir à la recherche d’un Traducteur Presger qui a disparu dans l’espace humain trois siècles plus tôt. Mais elle prend sa recherche au sérieux et va découvrir, sinon le traducteur en fuite, un descendant de celui-ci.
C’est le deuxième personnage important, Reet Hluid. Adopté sur Zéosen par une famille sans enfant biologique, Reet va se trouver mêlé au conflit politique entre deux ethnies humaines sur la station Rurusk et croira être le descendant d’un dirigeant hikapi, jusqu’à ce qu’Enie, le rencontrant par hasard, l’identifie comme le descendant de Traducteur Presger qu’elle recherche.
Le troisième personnage, Qver, est un Traducteur Presger rebelle, désireux de devenir humain. Et que les autres Traducteurs entendent utiliser pour réintégrer Reet dans leur société. Parce que les Traducteurs, on le découvre dans ce roman, ont une évolution mentale et biologique très différente de celle des humains à partir desquels ils ont été créés.
La découverte de Reet, puis sa demande d’être reconnu comme humain, contre la volonté des Presgers, et aussi contre celle du Radch, mais avec le soutien de plusieurs espèces, en particulier celui des Vaisseaux toujours en attente de reconnaissance comme espèce séparée par le comité du Traité avec les Presgers, va provoquer une crise qui menace l’existence même du traité.
Comme déjà dit, ce roman approfondit la description de l’univers dans lequel se déroulait la trilogie. En particulier il nous présente le mode de pensée des Traducteurs et leur évolution, totalement omise dans la trilogie. Il est donc passionnant. Mais je ne suis pas sûr qu’on puisse bien le comprendre sans avoir lu, d’abord, la trilogie de l’Ancillaire.
Transitions, d’Ann Leckie, traduit par Patrick Marcel, J’ai Lu Nouveaux Millénaires, 2024, 382 p., couverture de Lia Koltyina, 21€, ISBN 978-2-290-14128-1
[1]Parce que les anglophonees, pour éviter la confusion avec les autres emplois du mot genre, en particulier la notion de genre grammatical et ne voient par contre aucun risque de confusion avec les sens « époux de ma fille », emploient le mot gender, je crois utile d’employer son équivalent français pour la signification sociale du terme.