Pavane

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Relire ce classique de la littérature de fiction, cette uchronie d’une qualité rarissime est doublée d’une écriture soignée, un monde qui aurait peut-être pu être (la mort d’Elizabeth I et la victoire de l’Armada auraient-elles suffi pour le créer ?).

Des récits plus ou moins indépendants s’enchaînent pour préciser ce monde où certaines découvertes ont été faites et d’autres sont restées ignorées ou étouffées par l’interdiction de l’Église, où des bandits de grand chemin à cheval attaquent les trains qui circulent sans rails derrière des locomotives à vapeur, où les fées viennent veiller les télégraphistes mourants (il s’agit du télégraphe par sémaphore), où la révolte couve en dessous des apparences et éclatera pour une question d’impôts excessifs et de famine. Un curieux Coda semble indiquer que le joug de l’Église finira par disparaître ; quelques mots de la lettre qui conclut le livre comportent des noms venus de notre ligne de temps, comme si l’auteur de cette lettre avait connaissance de ce qui est ailleurs.

Bref un livre sans lequel il n’est pas possible de prétendre avoir compris ce que peut faire l’uchronie. Keith Roberts ne s’est pas facilité la tâche en écrivant ses récits plusieurs siècles après le point de divergence ; mais il a créé un monde cohérent et pose convenablement la question de savoir ce qui, dans le progrès technique, était inéluctable et ce qui est lié à l’évolution économique telle que la révolution industrielle l’a conduite. Il ne résout pas la question : son expérience spirituelle ne saurait valoir l’expérience pratique, irréalisable, de l’existence d’une ligne d’histoire alternée.

Comme expérience littéraire et philosophique, ce roman n’en est pas moins une réussite.

Keith Roberts, Pavane, traduction Franz Straschnitz et Dominique Defert, augmentée d’une préface de Gérard Klein, couverture : Jacquie Paternoster (tout à fait agréable), Livre de Poche, n°27061, 373 p.

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