Monde pour Clara (Un)

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Un récit pour jeunes adultes ? Bien sûr, puisque, conformément à la Règle d'Heinlein, l'héroïne est une adolescente, Diane. Sinon, toujours conformément à ladite règle, ce livre n'a rien de spécialement enfantin, si ce n'est la construction, qu'on trouve souvent en littérature adulte, en roman de découverte et de construction de l'héroïne. Celle-ci, parce qu'elle a perdu sa sœur jumelle Clara d'un cancer consécutif à une catastrophe nucléaire, s'est engagée dans un mouvement écologiste dirigé par le « Géophile » Ronsard, aux côtés de Léo, jeune homme très combatif dont la mère a disparu de la même façon. Dans une manif à Paris, elle est blessée juste après avoir, devant une journaliste de la télé, parlé de créer « un monde pour Clara ». Alors que Diane est blessée, qu'on la croit morte, la manif s'emballe, tourne à la révolution...

Dix ans plus tard, Diane sort, enfin, du coma. Le monde semble devenu un paradis. Paris, rebaptisée Neo-Lutèce, est devenue une ville écologique et les Enfants de Gaïa apprennent à respecter la nature. Et Diane, considérée comme Fille de Gaïa, pourrait se laisser convaincre par cette apparence de paradis retrouvé. Mais elle va assez rapidement découvrir que, loin du rêve auquel elle a failli croire, le monde géré par les Géophiles et défendu par les Chevaliers de Gaïa que dirige Léo est un enfer ; que la richesse apparente de Neo-Lutèce et de quelques autres villes réservées à l'élite du nouveau régime repose sur l'exploitation effrénée, le servage, du reste de la population. Une première tentative de fuite la mène dans la maison des Gendre, des victimes de la corruption locale. Leur fille, Zoé, est l'image même de Clara quand elle était vivante. Alors, Diane va devoir essayer de rejoindre le monde encore libre, loin de l'Europe asservie...

 

Le récit est tout à fait réussi : pas d'exposé didactique, juste l'enchaînement des découvertes progressives de Diane et, en même temps, du lecteur qui aurait pu lui aussi se laisser séduire par les apparences de cette utopie dévoyée. Il faut arriver à la fin du livre pour que, par la bouche de certains personnages, l'auteur explique que même l'énergie nucléaire, malgré ses risques, peut aider à construire un monde meilleur. Et que la solution éventuelle des problèmes n'appartient à aucun groupe de fanatiques, pas plus aux Géophiles qu'aux Capitalistes. Comme le feu brûle quand il n'est pas surveillé, mais peut être maîtrisé et contrôlé pour le bien de tous, il en est de même de tous les progrès scientifiques, médicaments, énergie nucléaire, informatique... Il ne faut pas jeter le bébé parce que l'eau du bain était sale. Comme le feraient trop facilement ceux qui accusent la science des méfaits liés à son mauvais emploi ou à des abus, et en particulier les Géophiles du livre...

 

Roman initiatique et de découverte, comme nombre de romans « jeunes adultes », mais d'abord roman de remise en perspective d'un certain nombre d'idées trop souvent présentées de manière simpliste et incorrecte, Un Monde pour Clara mérite d'être lu par tous, jeunes et moins jeunes, écologistes convaincus ou anti-écologistes...

 

J'ai vu sur le Net que nombre de lecteurs avaient été attirés par sa couverture. Elle le mérite et ne dépare pas un bon roman.

 

Un monde pour Clara par Jean-Luc Marcastel, Hachette, collection Black Moon, illustration de Frans Lanting et Vladimir Piskunov 2013, 346 p., 16€50, ISBN 978-2-01-203111-1

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