Armageddon Rag

Auteur / Scénariste: 
Traducteur: 

Musique du diable

You need coolin’, baby, I’m not foolin’

I’m gonna send ya back to schoolin’

Way down inside, a-honey, you need it

I’m gonna give you my love

I’m gonna give you my love, oh

Wanna whole lotta love !


Que sont nos rêves devenus ?

Début des années quatre-vingt, l’aube se lève chaque matin sur l’Amérique de Reagan et de Sandy Blair, écrivain en panne d’inspiration. Il a tout pour être heureux, vit avec Sharon, agent immobilier sexy et ambitieuse, vient de s’acheter une superbe Mazda. Mais Sandy ne va pas bien : ex-hippie, revenu de la contre-culture et du Mouvement, ancien de la contestation contre la guerre au Vietnam, ancien journaliste au Hedgehog, un magazine underground qui est maintenant devenu respectable, un Newsweek pour quadras anciens de Woodstock mais rangés des voitures. Sandy est clairement un inadapté, une incongruité dans un pays qui tente d’oublier les années soixante… Quand Jared Patterson, le rédacteur en chef de Hedgehog l’appelle pour un reportage sur les Nazgûl - hommage évident à Tolkien… -, ancien groupe de rock séparé depuis le meurtre de son leader, Sandy manque de s’évanouir : l’ancien manager, Jamie Lynch, vient à son tour d’être assassiné. Sandy est recruté pour mener une enquête sur le meurtre mais également sur les anciens membres du groupe sur l’air de « que sont-ils devenus ? » .

On the road again !

Sandy reprend donc la route, comme au bon vieux temps. Croise les anciens Nazgûl, en plus ou moins bon état, revoit ses anciens amis : Maggie, Froggy, Lark (devenu un pubard insupportable), Slum (retenu prisonnier par son père militaire)… et des évènements bizarres se produisent : le studio d’enregistrement du batteur des Nazgûl brûle, Sandy confond rêve et réalité, se retrouve dans le passé, à revivre les manifestations et les bastonnades des policiers. Il ne finit pas son article, sa petite amie le quitte. Hanté par ce rêve des années soixante qui s’est brisé, il est contacté par un promoteur, Edan Morse, dont le but est de reformer les Nazgûl pour une tournée géante. Problème : le chanteur est mort, rétorque Sandy. Morse sourit. Est-ce le rêve qui recommence ? Ou un cauchemar qui s’annonce ?

Dazed & confused

Armageddon Rag est un roman touffu, plein d’ambition. Martin nous livre une variation sur la possession démoniaque plutôt bien tournée - cet auteur a définitivement un talent de conteur et sait faire vivre ses personnages - en même temps qu’une méditation sur le destin de sa génération. Pour qui ne goûte guère les récits d’anciens de 68, Armageddon Rag agacera. De plus, les notations « sociologiques » peuvent gêner, voire dater un ouvrage qui, de ce côté-là, accuse clairement ses trente ans.

Par contre, amoureux de la musique rock, ce roman est clairement pour vous. A travers les Nazgûl revivent les Doors - pour le charisme et l’aura malsaine du chanteur - et Led Zeppelin - à cause de ces guitares heavy et du goût connu du guitariste Jimmy Page pour les sciences occultes. Et l’auteur, comme souvent, emporte l’adhésion du lecteur. Pour finir, laissons la parole à Jim Morrison, dont l’ombre plane sur les Nazgûl :

You know the day destroy the night

Night divides the day,

Tried to run, tried to hide,

Break on through to the other side

Let’s roll…

George R.R.Martin, Armageddon Rag, traduit de l’anglais (US) par Jean-Pierre Pugi, mars 2012, 528 pages, 22,50 €, Denoël

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