Héritage et autres nouvelles (L')
Ce recueil de nouvelles publiés sous les deux pseudonymes de l’écrivain rassemble des textes de styles différents et amplis d’une ambiance chaque fois particulière.
Cet ouvrage est assez exceptionnel à mon sens car il regroupe des écrits laissés pour compte depuis longtemps dans les tiroirs de l’auteur. Certains datent de 1989.
L’écrivain dévoile dans sa préface et dans « La dame d’Argent et le Quadragénaire » les aléas et les expériences de vie de tout qui souhaite vivre de son art dans une société marquée par le mercantilisme et la consommation. Mais, heureusement pour elle, son quadragénaire tenait peut-être bien de l’ange gardien, car, comme elle l’énonce : « quand un écrivain n’écrit pas, il suffit parfois que quelqu’un croie en lui pour que remettre le monde sur ses rails. Et de là naît une histoire... ».
Ce qui est captivant, pour ceux que les mécanismes de la création interpellent, est que chaque histoire est précédée d’une note introductive décrivant la mise en œuvre du récit par l’auteur et les rouages de son inspiration.
Pour le style, on prend un bain d’eau glacée futuriste avec les 7 nouvelles de Megan L et on tombe dans la fantasy médiévale avec Robin H. J’ose dire que j’ai directement été séduite par la science-fiction mais que les deux textes publiés sous le pseudo de Robin H m’ont laissé un petit goût de trop peu. « L’Héritage » surtout aurait bénéficié d’une fin plus palpitante. Je salue par contre le génie maléfique et délicieusement créatif du chat de « Viande pour chats ».
Oui, autant le dire, les chats occupent une place centrale dans les récits de l’écrivain. Ils sont partout, amis ou ennemis de l’homme, mais toujours dangereusement intelligents... Ils sont parfois magiques comme dans « Le cinquième chat écrasé » qui est une de mes préférées pour cette espèce de quatrième dimension à la fois loufoque et glauque dans laquelle on est entraînés à la suite d’un vieillard pris en stop par deux jeunes femmes en voyage.
Les deux nouvelles « Coupure » et « Boîte à rythmes » nous rapprochent d’un univers dystopique finalement pas si éloigné que ça de nous, où les adolescentes explorent les facettes extrêmes des modifications corporelles et où les enfants sont programmés en fonction du code génétique de leurs parents...
« Finis » plonge au creux d’un conte qui aurait pu être écrit par Daphné du Maurier ou Tanith Lee, tant son fantastique est imprégné de mélancolie caractéristique.
Pour terminer, je dirai un mot sur « Une note de lavande », la première de toute, qui fait cohabiter des extraterrestres ressemblant à des hommes-poissons et des humains dans un quartier défavorisé au cœur d’une grande ville. Mais toutes relations entre les deux espèces est interdite car les Skoags possèdent quelque chose dont les humains sont un peu trop friands. Rien ne déroge aux habitudes pour le petit héros et sa famille, jusqu’à ce que sa mère ne tombe sous le charme d’un Skoag prénommé Lavande et qu’il emménage chez eux. Qu’adviendra-t-il de l’enfant issu de cet amour, lorsque tout le monde apprendra la nouvelle ? Je vous laisse le découvrir vous-mêmes, si vous avez l’envie de faire une petite place à ce recueil dans vos bagages.
L’Héritage et autres nouvelles par Robin Hobb, traduction de Arnaud Mousnier-Lompré, J’ai Lu, 2013, ISBN : 978-2-290-07101-4