Renégat, Le soldat chamane T6 (Le)
Après l’expérimentation de la mort - ce n’est pas la première fois pour lui avec la peste ocellione - , Jamèe a franchi une barrière, il ne peut désormais survivre que dans le monde des Ocellions. Il est désorienté : il doit impérativement s’initier à l’utilisation positive de leur magie sous peine de se détruire et l’environnement qui l’entoure par la même occasion...
Dans ce sixième tome, nous découvrons Jamère sous un jour plus volontaire. Depuis qu’il accepte sa différence, Jamère est infiniment plus sympathique que le jeune soldat rigide des deux premiers épisodes.
Peu à peu, nous pénétrons le monde des Ocellions, le peuple autochtone de la Gernie, en proie au désarroi depuis que leurs territoires sont envahis et soumis à la civilisation des Gerniens.
Chacun considérant que son mode de vie le meilleur, les hostilités sont désormais de rigueur, à moins que Jamère ne puisse être un trait d’union entre les deux peuples et les deux cultures. Mais Robin Hobb va nous mettre les nerfs à vif d’ici là.
Distillant les informations sur Jamère et cette confrontation entre les peuples au compte goutte et nous contant force détails (pour notre plus grand plaisir) mais aussi pour notre plus grande impatience, Robin Hobb nous torture en délicatesse. Et le pire est qu’on est complice en demandant à en savoir toujours plus. Pauvre lecteur que nous sommes ! Sous le charme d’épisodes dont on voit, non sans appréhension, les dernières pages avec les mots incontournables de l’éditeur : « A paraître prochainement la suite… »
Pressés d’en savoir plus et dans le même temps, cruel paradoxe, voulant nous installer à l’aise dans les moindres recoins de l’histoire, voici la perversité de Robin Hobb qui nous soumet à son rythme.
Pour augmenter notre tension nerveuse, l’éditeur Pygmalion nous livre « Le soldat chamane » avec parcimonie, découpant en deux tomes ce que nous aurions grand plaisir à lire d’une traite.
Tout ce qu’on peut espérer, c’est que cet éditeur aura la délicatesse de nous offrir (façon de parler) les aventures de Jamère reliées ainsi qu’il l’a fait pour Fitz Chevalerie avec « La citadelle des ombres » et avec « Les rivages maudits ». Afin que tous les lecteurs passionnés puissent enfin savourer à leur aise, à leur rythme, la découverte du monde fabuleux des Ocellions et celui plus « occidental » des Gerniens.
Lecteur, toi qui en est peut-être à la découverte des premiers tomes, dis-toi que si Jamère te paraît un peu nigaud, que la présentation des deux mondes un peu lente, c’est pour mieux te prendre au piège. Et à ton tour, tu subiras la petite déprime : « Que lire après le dernier Robin Hobb ? ».
Heureusement pour ceux qui aiment la fantasy, il semble que ce soit la règle de la découper par épisode. Hélas et tant mieux dans le même temps de rêve !
A noter, en cette époque où l’obésité est considérée comme un fardeau social, cette suite romanesque décrit fort bien les processus de stigmatisation de celui qui est gros. Tout comme elle informe sur les tourments de l’âme de celui qui veut maigrir mais ne le peut.
Le renégat, le soldat chamane, tome 6 par Robin Hobb, traduit par Arnaud Mousnier- Lompre, illustration de Christophe Vacher, Pygmalion