Deux mondes (Les)
La vie en plus
Rémy et les Bégaméniens
Dans un monde parallèle, au village de Bégaméni, une tribu primitive opprimée fait désespérément des incantations au ciel afin que le Sauveur, dont l’arrivée est mentionnée dans le texte d’une très ancienne prophétie, vienne enfin les libérer de la tyrannie de Zotan, un géant cannibale qui les tient sous sa coupe et les terrorise depuis des décennies.
A Paris, dans notre monde “normal”, Rémy Bassano est un petit restaurateur d’œuvres d’art, timide et réservé, qui mène une vie sans histoire aux côtés de sa femme Lucile et de leurs deux enfants. Suite à un malencontreux concours de circonstances, son atelier de restauration se retrouve inondé. Rémy perd alors non seulement son travail mais est aussi poursuivi par le responsable du musée pour lequel il était en train de restaurer un tableau de grande valeur ainsi que par sa compagnie d’assurances. Comble de malchance, sa femme lui annonce également qu’elle le quitte pour refaire sa vie avec un autre homme. Déprimé par cette série de catastrophes qui s’abattent sur lui, Rémy tente de chercher du réconfort auprès de ses proches. Au cours d’un déjeuner en famille chez ses parents, il se rend à la cuisine pour préparer du café lorsqu’il est brusquement aspiré par le sol et il se retrouve alors instantanément à Bégaméni, complètement désorienté et ignorant tout de ce qui a bien pu lui arriver. Là, dans leur étrange village, les Bégaméniens l’accueillent comme le Sauveur qu’ils attendaient depuis toujours.
Les portes de la gloire
A partir de ce moment-là, Rémy navigue, de façon incontrôlable, entre les deux mondes où il gère parallèlement comme il peut, dans l’un, sa rupture avec Lucile, sa faillite professionnelle ainsi que son attirance grandissante pour une de ses anciennes clientes et, dans l’autre, la libération d’un peuple opprimé, la guerre contre les hordes de Zotan, la construction d’un véritable royaume ainsi que les problèmes quotidiens de tout un peuple qui compte entièrement sur lui.
Après avoir, dans un premier temps, refusé l’impossible puis avoir été intrigué par cette autre civilisation, Rémy finit par vraiment se prendre au jeu et par accepter son rôle de Sauveur. Lorsqu’il retourne dans sa vie normale, il en profite pour potasser tous les livres traitant de l’Art de la Guerre et pour mettre au point, en se servant des jouets de ses enfants, la meilleure tactique pour vaincre Zotan et ses féroces guerriers. Une fois la victoire remportée, il savoure avec délectation son triomphe et profite pleinement des avantages qui vont de pair avant de finir par devenir, à son tour, un véritable tyran, tout en étant intimement persuadé de faire au mieux pour assurer le bien-être de son peuple car parfois à trop vouloir faire le Bien, on peut aussi malheureusement finir par faire le Mal. Ces allers-retours intempestifs entre les deux univers vont lui permettre d’exprimer pleinement son potentiel pendant un certain temps mais, petit à petit, les habitants de cet autre monde vont le dépasser et les rôles vont s’inverser.
Le temps suspendu
Les Deux Mondes est une comédie fantastique, loufoque et décalée, qui se déroule en partie dans un autre monde. La notion de temps dans ces deux univers n’est pas la même. En effet, lorsque Rémy a l’impression d’avoir passé plusieurs semaines avec les Bégaméniens, il ne s’est, en réalité, écoulé que quelques minutes dans notre monde. Les proches de Rémy n’ont donc pas le temps de s’apercevoir de ses multiples disparitions et il lui est impossible de leur parler de cet autre monde dans lequel il se rend, sous peine de passer pour un fou furieux. Ses proches mettent son comportement étrange et son accoutrement bizarre sur le compte de ses problèmes professionnels et familiaux. Le film est également une fable métaphorique qui sert, en quelque sorte, de réflexion philosophique sur le potentiel caché en chacun de nous, en mettant en exergue la différence entre ce qu’on pense être capable de faire de sa vie, ce qu’on en fait réellement et ce que les gens perçoivent de nous.
Il est indéniable que Daniel Cohen a su, bel et bien, créer de toutes pièces un monde imaginaire cohérent (définition de la psychologie des divers personnages, mode de vie et coutumes, croyances, langage, architecture des lieux, costumes et accessoires, etc…) et que les effets spéciaux (le film comporte environ 150 plans truqués) sont à la hauteur de nos espérances. De son côté, une fois encore, Benoît Poelvoorde donne sans compter de sa personne pour faire le grand écart entre l’exubérance truculente de son rôle de Sauveur, dérapant peu à peu vers celui d’un “dictateur” mégalo, et la dépression liée à la perte de ses repères (tant professionnels que familiaux) dans la vie terne et morose du quotidien que vit son personnage dans notre monde. Malgré cela et les nombreuses scènes burlesques qui ponctuent l’histoire, on est quelque peu déçu par l’ensemble car, même si on passe un bon moment, au final, on reste singulièrement sur sa faim. Cette sensation est, en partie, dûe au fait que la fin est trop conventionnelle et manque singulièrement d’un “grain de folie”, surtout compte tenu de ce qui a précédé.
Les Deux Mondes
Réalisation : Daniel Cohen
Avec : Benoît Poelvoorde, Natacha Lindinger, Michel Duchaussoy, Daniel Cohen, Pascal Elso, Arly Jover, Zofia Moreno, Stefano Accorsi.
Sortie le 21 novembre 2007
Durée : 1 h 45