Empire
Tous les passionnés de l'Empire romain ont lu La vie quotidienne à Rome à l'apogée de l'Empire, de Jérôme Carcopino, bible parue en 1939, et toujours de référence. L'écrivain parcourait la civilisation romaine au travers des activités humaines publiques et privées : les rites, l'éducation, le mariage, les thermes, le commerce, les repas, etc.
Voici qu'en 2016 paraît, non pas un remake de cette somme, mais un livre qui a, en quelque sorte, le même but, tout en étant coulé dans une forme nouvelle et très originale. L'auteur, manifestement familier de l'Antiquité romaine, nous fait visiter l'Empire romain à partir d'un sesterce. C'est là son astuce : il prend comme prétexte une pièce de monnaie. Fatalement, elle change sans cesse de possesseur. Et c'est ainsi que nous partons pour un formidable périple dans la civilisation romaine de 117-118 : c'est la fin du règne de Trajan, l'Empire est à son âge d'or.
On part de Rome, bien sûr, on file tout de suite à Londres, puis en Écosse (le mur d'Hadrien n'est pas encore construit), on revient à Lutèce puis en Germanie, où l'on assistera à une bataille sanglante. On visitera toute l'Italie, évidemment : Milan, Rimini, Naples... Au hasard du cheminement de la petite pièce, on ira plus loin : Espagne, Afrique, Égypte, Inde même, et Mésopotamie, ou l'on rencontrera l'Empereur. Retour à Rome via Éphèse.
J'ai admiré cette idée géniale, mais toute simple, de faire découvrir les mille et une facettes de l'Empire romain via le trajet d'une pièce de monnaie, qui passe de main en main. Tous les milieux sociaux seront ainsi approchés, des légionnaires aux marchands, des nobles aux voleurs, des dignes matrones aux ouvriers agricoles, des prêtres aux prostituées, des esclaves à l'Empereur.
Usque ad finem ? Certes : à partir de sa frappe dans l'atelier monétaire, nous aurons assisté à toute la vie du sesterce, jusqu'à son dépôt dans la bouche d'un défunt : il finit comme obole pour Charon le nocher, la boucle est bouclée.
Voilà une magnifique réussite littéraire, bien écrite, souvent palpitante, et toujours intéressante.
Alberto Angela, Empire, Éditions Payot & Rivages, Paris, 2016, traduction de Nathalie Bouyssès et Mario Pasa, couverture d’Éric Doxat, 462 p., 24 euros.
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