Solaris n°174
Après le 173 plutôt hors normes (voir ma critique toute récente), voici un Solaris ’normal’ et de la plus belle eau, qui plus est, dès la superbe couverture de Gégory Fromenteau. Le rédacteur en chef, Joël Champetier, a décider de le consacrer à la SF... française. Car les débuts de la SFFQ n’ont-ils pas été dominés par des personnalités françaises immigrées telles Norbert Spehner, Elisabeth Vonarburg ou Jean-Marc Gouanvic ?
Numéro spécial « Invasion française » donc, avec d’excellents textes d’auteurs hexagonaux. Lilas de Pascale Raud, par exemple : magnifique récit fantastique inspiré de Bretagne. Un romancier est injurié puis menacé par ses propres personnages et, affolé, cherche le salut auprès d’une jeune sorcière. Très réussi. Monsieur Gâteau de Dave Côté, auteur que comme Raud nous avions lu dans le ’round robin’ du n° 173, est assez amusant dans sa description des affres d’un homme littéralement fait de pâtisserie. La dernière fête avant l’oubli de Romain Ducazeau est un curieux mélange de peplum et d’utopie, assez original. Richard D. Nolane nous divertit prodigieusement dans un texte tenant de San-Antonio par le style et de l’énorme clin d’oeil affectueux par le fond. Le Malin des magiciens décrit en effet une aventure de Jacques Bergier, bien connu de nous tous, confronté à un mystérieux cube informatique enfoui dans les charbons de la Préhistoire. Le tout vu du point de vue d’un certain Fernand, truand truculent. La rencontre finale, après un petit pipi, ntre Bergier et... Manse Everard (que tout amateur de Poul Anderson reconnaîtra) vaut son pesant d’or. Très pointu sans doute, mais délirant, comique en diable, bourré d’allusions, et qui divertira à l’extrême tout amateur de SF chevronné. Une perle pour initiés peut-être, mais les dits initiés en rient encore. Récupérons notre sérieux pour mentionner le sympathique article de Jérôme-Olivier Allard sur Robert E. Howard, petite étude résumant les principaux récits des aventures de Conan. Et surtout, car c’est peut-être le clou de ce numéro, les carnets du Futuribles de Mario Tessier, joliment intitulé « Barbarella mon amour, ou la science-fiction française des années cinquante et soixante ». Carnets pleins d’élans passionnés d’un Canadien pour cette ’vieille’ SF d’outre-Atlantique et magistralement rédigés. Il brosse en quelques vingt pages (richement illustrées en plus) un panorama de la SF en France, tous médias confondus.
Il est vraiment agréable de voir que nos cousins canadiens vénèrent nos auteurs à ce point, de José Moselli à Gérard Klein. Les noms de Carsac, Wul, Henneberg ou Steiner défilent à l’envi... Merci Mario ! Voilà donc un numéro superbe, qui nous relie indéfectiblement avec l’Outre-Flaque !