NAGATA Linda 01
Je commence par te demander de raconter ta vie : où et quand tu es née, ton enfance, ta jeunesse, tes études, tes lectures favorites, tes débuts d’écrivain et tes premières publications...
Je suis née à San Diego, Californie, en 1960. Mon père était un employé civil de l’US Navy. Quand ils ont décidé de fermer son bureau, ils lui ont offert la possibilité de partir à Guam, et il a accepté. Ma mère choisit de rester en Californie avec les enfants, mais, quelques mois plus tard, mon père avait obtenu un nouveau transfert, cette fois-ci vers Pearl Harbor, aussi ma mère accepta-t-elle de le rejoindre à Hawaï – où je vis depuis lors. C’était en 1970, ainsi suis-je devenue une insulaire pour la plus grande partie de ma vie. Je suis allée à l’école à l’Université de Hawaï, j’ai obtenu un diplôme de zoologie, mais plutôt que de poursuivre mes études vers la maîtrise, j’ai trouvé plus agréable de déménager à Maui et de me marier. Je ne sais pas bien ce que je désirais faire alors (je n’ai toujours pas trouvé depuis), mais il me paraissait qu’écrire de la science-fiction était plus intéressant qu’autre chose. J’ai pris à mon père l’habitude de lire de la SF, et c’était la plus grande partie de ce que je lisais. Malheureusement, je n’avais aucun entraînement à l’écriture de fiction, aussi cela m’a-t-il pris longtemps pour écrire quelque chose de valable.
Je n’ai encore trouvé en France que deux romans de toi, et j’ai chargé sur Internet ta novella « Goddesses ». Ce n’est pas assez pour permettre une opinion générale sur ce que tu écris, aussi te demanderai-je de donner ton point de vue : comment trouves-tu des idées, quels sujets te paraissent intéressants à lire ou à écrire, tes romans sont ils « story-driven » ou « character-driven » et t’occupes-tu plus des découvertes scientifiques, des conséquences sociales de ces découvertes, de l’évolution psychologique de l’esprit humain... ?
La plupart de mes romans sont basés sur des spéculations sur la nanotechnologie et mon arrière-plan de biologie. En considérant des processus de biologie et de métabolisme comme de la nanotechnologie naturelle, il devient plus aisé de réfléchir aux possibilités d’une nanotechnologie avancée. Les questions qui m’intéressent sont l’évolution d’une telle technologie, comment développer des défenses contre les accidents. Quelle sorte de contrôles sociaux et technologiques seraient mis en place ? Le contrôle n’est-il qu’une illusion ? Est-il possible de stopper une évolution non désirée ou - dans un monde si grand - est-ce que n’importe quelle possibilité sera essayée quelque part ?
Les personnages sont importants pour moi. Les personnages donnent de l’émotion à l’histoire et, sans émotion, une histoire n’est qu’ennuyeuse. Mais c’est la lutte contre l’adversité qui est intéressante pour moi, et les conflits entre des gens bons, mais aux points de vue différents.
Le genre de SF que j’aime le plus est le récit d’aventures dans des mondes qui pourraient apparaître, le murmure du possible.
Une question que je pose toujours : Y a-t-il une oeuvre d’un autre auteur que tu aurais voulu avoir écrite, soit parce que tu es jalouse de ce qu’un autre ait eu cette idée avant toi, soit parce que tu es furieuse d’un roman complètement à côté de ton idée, que tu aurais traitée d’une façon totalement différente ?
Je pense devoir revenir très en arrière et je citerai The Integral Trees deLarry Niven. Ce n’est pas tant le roman que je jalouse, mais l’environnement. Combien j’aimerais jouer avec un tel monde de micro-gravité !
Quelle est ton opinion sur l’état actuel de la littérature et celui de la science-fiction ? Positif, négatif, remarques, espoirs....
Je n’ai pas lu assez de science-fiction ces dernières années pour émettre une opinion. Mes centres d’intérêts sont mouvants et j’ai lu surtout des livres mainstream et des oeuvres anciennes. Je pense que la SF – aussi bien que le reste de ce qui paraît – est en peine, au moins aux USA. C’est ironique et plutôt amusant (d’une façon sombre) que la littérature de la technologie est menacée par une technologie concurrente – celle des jeux. Je connais beaucoup de joueurs en dessous de vingt-cinq ans qui achèteront nombre de jeux à $50 plutôt qu’un seul livre (en supposant qu’ils lisent encore de la fiction). C’est décourageant parce que dans la génération précédente (et avant) les mêmes gens brillants et créatifs auraient été le coeur de notre public. Comment reprendre un public plus large est le plus grand défi auquel la SF doive faire face.
Tu nous dis sur ton site qu’actuellement tu ne disposes pas du temps nécessaire pour écrire de nouveaux livres. Est-ce un ennui provisoire ou cela risque-t-il de durer ?
Depuis le début de l’été je ne travaille plus qu’à mi-temps à mon boulot de programmation, et cela m’a donné l’occasion de consacrer plus d’heures à des projets d’écriture. J’ai entamé un roman mainstream, et j’ai trouvé l’idée d’un nouveau projet de SF. Je travaille aussi un peu pour une compagnie de média, ainsi tout va bien maintenant. Le regain d’intérêt sur Aux Marges de la vision depuis sa publication en France a aussi été source d’inspiration. Avec un peu de chance, il se pourrait que je revienne à l’écriture à plein temps.
Critique de "Aux marges de la vision" ici !