Terre sauvage (La)
Le volume comprend la trilogie post-apocalyptique du Fleuve Noir, c’est-à-dire L’Autoroute sauvage, La Mort en billes, L’Île brûlée, quelques nouvelles plus ou moins anciennes sur le même thème de la survie (ou non) après catastrophe, des postfaces de Laurent Genefort et Serge Perraud sur l’oeuvre de Julia Verlanger.
Relire cette trilogie qui, écrite avant la sortie de Mad Max, nous plonge dans un univers semblable à celui que ce film a popularisé, captivera surtout les lecteurs qui s’intéressent à l’histoire de la SF ou ceux qui veulent retrouver des souvenirs, compléter une lecture partielle. Pas que l’histoire soit datée sur le plan de la prospective : cela peut encore arriver. Sur le plan artistique, en revanche, thème et écriture sont datés. Julia était un auteur de son temps ; elle a évolué au cours de sa carrière, bien sûr, mais de 1956 à 1985 elle écrivait pour les lecteurs contemporains, pas pour ceux à venir.
Il s’agit donc de l’histoire de survivants après un conflit qui a vu l’utilisation d’armes bactériologiques et une suite d’épidémies qui ont détruit la civilisation. Ont survécu quelques groupes où les « loups » dirigent les « moutons » et quelques solitaires qui parviennent à survivre en nomades. L’histoire est racontée par un de ces solitaires qui, après avoir tué un chef de groupe, hérite d’une compagne qui veut absolument aller à Paris, dans l’un des lieux les plus pollués et dangereux, chercher les documents qui permettront de vaincre la plus grave des maladies issues de la guerre, Peu à peu, le solitaire va se trouver mener un groupe d’amis pour accomplir cette mission, puis combattre une nouvelle menace qui se sera révélée au cours de cette première quête, enfin empêcher que la civilisation qui renaît lentement en France et en Suisse soit détruite par un autre groupe qui recrée une civilisation d’esclavagistes... Un monde et des aventures à la Mad Max, on vous dit... mais dix ans avant les films.
Pour l’histoire, je ferai une remarque déjà faite pour d’autres romans post-apocalyptiques, par exemple la série des Calculateurs de Sean McMullen : placer l’histoire trop loin après la catastrophe rend invraisemblable la possibilité de reconstruction sur les bases anciennes ; imaginer que les héros de la trilogie soient nés après la guerre bactériologique et n’aient jamais connu la civilisation pré-apocalyptique rend leurs actes incohérents. Et il faudrait encore moins longtemps pour que les traces technologiques (l’autoroute, les restes de réserves) aient plus ou moins complètement disparu. Personnellement, je trouverai l’histoire moins invraisemblable si elle se passe cinq à dix ans après l’effondrement de notre « civilisation » et si les héros l’ont sinon vraiment connue, du moins en ont reçu une empreinte forte par leurs éducateurs. Ce qui limite la durée de l’intervalle avant que l’histoire commence.
Ce premier volume annonce une collection indispensable pour les amateurs de SF. Souhaitons longue vie à la dite collection.
VERLANGER Julia, La Terre sauvage, premier volume de l’Intégrale des oeuvres de Julia Verlanger dans la collection Trésors de la SF de Bragelonne, couverture de Benjamin Carré, 492 p.