Tableau du maître flamand (Le)
Chargée de nettoyer un tableau flamand du XV° siècle intitulé La partie d’échecs avant sa mise en vente, Julia, une jeune restauratrice, découvre par hasard une inscription dissimulée sous le vernis : « qui a tué le cavalier ?». En approfondissant ses recherches, elle découvre l’identité des personnages représentés sur la toile, dont un, surtout, mort deux ans avant la réalisation de l’œuvre. Julia décide d’en parler à son amie Menchu qui a obtenu le tableau et qui dirige une galerie d’art, à César, son mentor et collectionneur acharné, et à son ancien amant, le professeur Alvaro. Mais ce dernier décède brutalement, assassiné. Julia comprend que quelqu’un s’intéresse beaucoup au tableau et qu’il s’est lancé comme objectif de poursuivre la partie d’échecs représentée, jusqu’à la fin, quitte à semer des cadavres sur son chemin.
Voilà un roman étrange, difficilement classable, en tout cas pas un thriller classique au sens propre du terme. Perez Reverte prend son temps, c’est un roman lent, où il se passe peu de choses finalement, axé sur l’art, la peinture en l’occurence, et cette incroyable partie d’échecs qui se joue à travers le temps depuis le XV° siècle jusqu’à nos jours. C’est d’ailleurs elle qui constitue tout le sel du récit. En dehors du joueur, Muñoz, véritablement attachant dans sa démarche de ne jamais gagner une partie pour ne pas montrer qu’il est le plus fort, les autres protagonistes sont souvent poussés à la caricature, entre Menchu qui refuse de vieillir et s’habille et se maquille comme une midinette, César en homosexuel façon Cage aux folles version tragique, Feijoo l’inspecteur de police maladroit et dépassé.
Assez rapidement j’ai compris qui était le coupable. Comme le dit Conan Doyle dans Le signe des Quatre : “Lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité.” Cet improbable au regard de la partie d’échecs à laquelle se livre Muñoz et le mystérieux tueur, devient une évidence. Ce qui l’est moins, ce sont les explications finales, la justification de toute l’affaire et les crimes. On a l’impression d’assister à une tragédie théâtrale. J’avoue pour ma part qu’après tout le déroulement du roman il m’a manqué ce petit quelque chose pour en faire une histoire parfaite. Dommage, car cet échange de coups par pions interposés est une merveille en soi.
Je remercie les éditions Folio pour leur confiance.
Arturo Perez-Reverte - Le tableau du maître flamand - Éditions Folio, août 2024, 9,90€, (ouvrage paru au Livre de Poche en 1994)