Voeu de Marc (Le)

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La cour de récréation est un lieu cruel pour qui l’arpente pour la première fois. Elle est une sorte de monde en miniature avec ses exclus que l’on tabasse, ses fous que l’on rejette et qui se vengent sur les animaux, avec ses groupes qui vous dévisagent lorsque vous piétinez leurs plates-bandes et ses gros durs qui vous frappent si vous n’êtes pas de leur côté. Pour Marc, c’est le jour de la rentrée. Petit nouveau dans une école de campagne, il va se confronter à cette société en miniature. Mais par chance, il rencontre le génie de la lampe qui exaucera tous ses vœux.

Enfin, est-ce vraiment une chance de rencontrer un homme tout puissant capable d’exaucer toutes vos envies ? Cela vous prépare-t-il seulement à affronter ce que le monde des adultes est et restera, un monde contrasté ?

Reprenant le conte des « Mille et une nuits », « Le vœu de Marc » ne se veut certainement pas un remake de l’Aladdin de Walt Disney. Ici, le récit joue la carte de la contradiction et rappelle combien l’enfant réel, mais aussi l’enfant en nous, a du mal à appréhender ce monde emprunt d’injustices.

Par exemple, Claude, le petit gros que l’on tabasse pour se défouler. Il est pourri gâté par une mère possessive. Celle-ci accapare son emploi du temps. Elle est prête à tout pour lui, elle fait tout pour lui. Du coup, elle devient ses amis, son adulte référent et enferme Claude dans un mal être permanent. Alors, pour compenser son manque d’assurance, il bouffe, il ne se défend pas quand on le brutalise, comme si recevoir des coups lui permettait d’avoir au moins ce contact avec les autres. Seulement, lorsqu’un vœu permet à Claude de s’émanciper, va-t-il mettre son assurance au service de la justice ? Et bien, non. Il se vengera comme les tyrans l’ont fait avant lui.

Au niveau des dessins et des couleurs, les couleurs criardes s’opposent idéalement au trait sombre et envahissant de Lucie Albon. C’est comme si l’esprit de Marc et les couleurs qui l’habillent se confrontaient ensemble au monde qu’ils arpentent. Cela donne une touche fusain, impressionniste, inquiétante par moments, rassurante d’autres fois.

Les textes sont également le fruit d’un soin particulier. Ce proviseur qui annonce « Cette année, pour l’exercice d’alerte, nous allons utiliser l’abri atomique que nous a offert la mairie ». Cette mère violente et alcoolique qui s’écrie « Ne repousse pas maman. Je t’aime tant ! Quand je ne t’embrasse pas, j’ai l’impression d’étouffer ». Ou encore cette petite fille qui joue à la game boy pendue à un arbre et qui dit « T’as vu mon jeu ? Au début, c’est rigolo, mais après j’ai eu les vies infinies, alors c’est trop facile ! ». Toutes ces phrases choc placent le décor et donnent le ton.

Après, ne croyez pas que cette bd vous donne la déprime. Tout n’est pas rose, c’est vrai. Mais il y a une happy end. Car contrairement à ce que les médias ou les politiques veulent nous faire croire, il est possible de positiver sur ce monde. Il existe des solutions. Une femme comme Sœur Emmanuelle a-t-elle cessé de croire ? C’est juste que l’enfant est comme une fleur qui s’ouvre à la vie et qu’il doit prendre le temps de s’épanouir, sans que nous autres adultes ne voulions penser pour eux. Les expériences peuvent être violentes. Mais ne jamais juger, car nous sommes adultes et savons. Les blessures peuvent être fortes. Mais ne jamais se contenter d’un pansement et chercher à savoir le pourquoi. Voilà toutes les pensées qui me viennent à la lecture de cet ouvrage fabuleux qui remet l’enfant et l’adulte à leur niveau, sans tomber dans la mièvrerie, ni le négativisme total.

Lien vers les premières planches de l’album :

http://www.la-boite-a-bulles.com/fiche_album.php ?id_album=23

Titre : Le vœu de Marc
Scénario : WILD Nicolas et BOULET
Dessin : ALBON Lucie
Editeur : La boîte à bulles
Collection : Clef des champs
Nombre de pages : 48

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