Starfish


C’est un livre que j’ai failli détester parce qu’il est trompeur : il commence comme un thriller à la manière de Shutter Island, avec quelques personnages dont, à mon avis, l’étude psychologique n’est pas fouillée, mais tel n’est pas le but du livre. Les présentations des réflexions de ces personnages, presque tous psychotiques, servent surtout à faire avancer l’intrigue vers l’abominable quiproquo final. L’idée qui aurait pu être approfondie de savoir pourquoi et comment des personnalités déviantes étaient nécessaires pour affronter les conditions de vie dans cette fosse sous-marine et comment ces déviances, les modifications physiques imposées aux travailleurs de cette base sous-marine et les conditions particulièrement pénibles aboutissaient à l’apparition de mutations mentales n’est pas l’objet du roman, même si le lecteur qui croit lire un simple thriller peut être abusé et, dans mon cas, repoussé par le fait que ce sujet ne soit pas vraiment traité.

Mais le problème est autre. Les personnages savent que la société qui les emploie leur cache certaines choses que le lecteur ne découvrira qu’assez loin dans sa lecture. Et le fait même de cette dissimulation va les mener à prendre certaines dispositions qui, par leurs interférences avec les volontés, distinctes, des responsables du projet et du « gel intelligent », espèce d’I.A. biologique qui a acquis par autoformation une vision du problème contraire à celle désirée par les responsables, vont entraîner la catharsis finale. Comme ce problème et les motivations réelles des responsables de la société d’une part et l’importance de l’intervention du gel de l’autre ne commencent à intervenir que très tard dans le livre (je dirais page 321), le lecteur qui, comme moi, ne s’intéresse pas aux études psychologiques assez superficielles sur des personnages par ailleurs trop spéciaux, fera bien de tenir jusqu’à ce que la véritable image cachée commence à apparaître. Parce que la fin du roman, l’enchaînement de malentendus jusqu’à la catastrophe, sur laquelle ne s’étend pas Peter Watts mais que les lecteurs américains apprécieront sans détails inutiles, vaut la peine d’aller jusqu’au bout.

Peter Watts s’est bien documenté sur les problèmes techniques, biologiques et géologiques qui font l’objet du roman. Il ne faut donc pas se laisser prendre à l’impression de « thriller psychologique » que donne le début de celui-ci. Même si la préparation est lente et peu visible, c’est la fin qui justifie l’oeuvre.

J’apprends par ailleurs que Starfish est le début d’une trilogie dont le deuxième volume devrait paraître en France bientôt : je l’attends avec impatience.

Un détail : Starfish, c’est une étoile de mer. Le dessinateur de la couv s’est trompé. La couv est jolie, mais elle oublie un point clé de l’histoire, présent dans le titre.

Starfish de Peter Watts, couv. Mike Hill, 380 p., Fleuve Noir Rendez-vous ailleurs

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